Alors que le bio fait les beaux jours de la viticulture hexagonale, qui a vu 15% de ses vignes obtenir la certification, et su séduire les amateurs de vin, le rhum bio semblait jusqu’il y a quelques années traîner la patte. Or le succès rencontré par le précurseur Neisson et une réelle volonté des distilleries de préserver l’environnement, ont donné récemment naissance à de nombreuses cuvées bio. Une vaguelette de fond pour le moment… Mais qui préfigure probablement l’avenir des rhums français.
Le bio est-il l’horizon indépassable des rhums des Antilles, et plus largement des rhums français ? La question peut paraître un brin provocatrice, voire issue des monomanies d’un bobo parisien… et pourtant, on est en droit de se la poser lorsqu’on voit la floraison de cuvées bio de ces dernières années.
Presque toutes les distilleries des Antilles françaises ont fait basculer au moins une parcelle en bio, ou sont en train de le faire. On citera bien sûr le précurseur Neisson, mais aussi et toujours en Martinique Saint-James, A1710, Depaz… En Guadeloupe Bologne, Père Labat, Longueteau… À la Réunion, Isautier… En Polynésie Française, Manao, Manutea… En métropole O’Baptiste, Vivants…
Chez les embouteilleurs indépendants La Maison du Rhum, Tres Hombres… Hors de nos frontières Barcelo (République Dominicaine) ou encore des cachaças comme Abelha, Novo Fuego (Brésil)… Et c’est sans compter tous les grogues (Cap-Vert) et les clairins (Haïti), qui sans avoir de label bio n’utilisent pas de pesticides lorsqu’ils cultivent la canne à sucre. Bref arrêtons là l’inventaire à la Prévert, qui ne sera de toute façon plus à la page au moment où le magazine paraîtra, vu le rythme effréné des sorties de nouvelles cuvées bio.
3 ans de transition
Mais au fait de quoi parle-t-on lorsqu’on brandit le label bio ? Selon les textes européens, est bio un produit qui a été élaboré sans le concours de pesticides de synthèse, et/ou avec des ingrédients eux-mêmes bio.
Appliqué au rhum, cela signifie que les cannes à sucre (que leur jus soit fermenté puis distillé, ou transformé en mélasse), doivent avoir été cultivées sans aucun produit phytosanitaire. Les autres ingrédients qui peuvent entrer dans sa composition (levures, caramel, édulcorant…) doivent eux aussi être certifiés bio.
La certification d’une parcelle bio n’est pas une mince affaire car elle se fait en 3 ans, au cours desquels des cannes à sucre qui ont l’habitude d’être traitées avec des pesticides, doivent subitement faire sans.
Si aucun produit phytosanitaire n’est utilisé pendant ce laps de temps, l’organisme certificateur (par exemple ecocert), décernera le label, que le producteur de rhum pourra faire figurer sur ses bouteilles, soit avec la mention AB (agriculture biologique), soit avec la feuille européenne verte, soit les deux.
Se passer des herbicides
Aux Antilles (de même qu’à la Réunion ou en Polynésie), l’entreprise est à la fois plus aisée, et plus compliquée qu’il n’y paraît. En effet, peu ou pas de fongicides et d’insecticides y sont utilisés.