Bien que provenant de la plus petite distillerie de Martinique, les rhums J.M. sont certainement parmi les plus réputés et probablement les rhums vieux préférés des Martiniquais. L’explication est assez simple en fait : c’est un véritable modèle du genre pour l’élaboration du rhum agricole dans les Antilles françaises ! Une seule propriété de 300 ha, une distillerie située au cœur du domaine, trois propriétaires en plus de deux siècles, des méthodes de production inchangées depuis des décennies : ces quatre éléments de base expliquent bien que les rhums J.M. en sont la quintessence, ce cinquième élément imaginé par les philosophes de l’Antiquité. Y a-t-il quelque chose d’ésotérique dans une telle combinaison qui expliquerait l’étonnante richesse des rhums qui en résultent ? Allez savoir. Mais il est sûr que leur dégustation invite à de telles divagations que l’imagination ne peut s’empêcher de laisser se développer.
Rien de bien mystérieux par contre dans les initiales de cette distillerie : ce sont celles de Jean-Marie Martin. Né en Haute-Garonne en 1799, il vient s’installer en Martinique et y fait l’acquisition en 1845 d’une plantation, le Fonds-Préville comme on dit dans l’île, et y installe une distillerie. Et, pour bien distinguer les fûts qu’il élabore et envoie à Saint-Pierre, la capitale de l’île, pour y être commercialisés, Jean-Marie Martin y inscrit tout bonnement ses initiales. Le Fonds-Préville, quant à lui, date de 1790 lorsqu’il est devenu la propriété d’Antoine Leroux-Préville. Il est situé tout au nord de l’île, de l’autre côté de la Montagne Pelée, sur la commune de Macouba. Hasard de l’histoire, c’est dans cette paroisse que le Père Labat a exercé son ministère de 1694 à 1696. Un nom qui parle aux connaisseurs de rhum : on lui attribue un rôle décisif dans le développement de la distillation en Martinique. C’est peut-être un peu exagéré, même si ce moine dominicain a fortement marqué son époque. Botaniste, explorateur, militaire, ingénieur, écrivain, dessinateur… le Père Labat a joué un rôle important dans l’amélioration des techniques de distillation de l’eau-de-vie de canne, jusque-là fort rudimentaires et donnant des eaux-de-vie de mauvaise qualité.