La première moitié du XVIIIème se place, malgré quelques assouplissements, dans la dynamique de la fin du XVIIème, à savoir une tentative de contrôle voire de restriction de la production, de la consommation et de la commercialisation du rhum dans les colonies. Mais cela n’empêche pas la fraude qui semble gêner les producteurs métropolitains d’eaux-de-vie, pour qui le tafia des colonies devient un sérieux concurrent.
Une opposition métropolitaine frontale
Les colonies sont accusées de provoquer un manque à gagner pour le Royaume de France. En 1751, Jean-Baptiste Gastumeau publie un Mémoire pour le corps de ville de la Rochelle sur la fabrication et le commerce des eaux-de-vie de sirops, connues sous le nom de taffias et guildives, mémoire relevé par l’historienne Bertie Mandelblatte, dans lequel le tafia est accusé de tous les maux. Pour dénigrer le tafia, il écrit ceci : « Le Roi tire des revenus immenses des Eaux-de-vie et des peuples des vignobles ; dans nos Isles la Guildive n’est qu’un superflu de 2000 habitants déjà riches, superflu qui se trouve après une récolte déjà faite, qui n’oblige à aucuns travaux de plus, qui n’augmente pas l’Etat d’un seul homme, qui ne donne rien et ne donnera jamais rien au Royaume, et qui par malheur ne pourra que lui nuire ».
En 1754, Pierre-André O’Héguerty estimait dans son Essai sur les intérêts du commerce maritime, à 140 millions de livres la valeur de la production des colonies françaises. Il accuse la Martinique de s’être permis, malgré les interdictions, de raffiner du sucre et d’amputer à hauteur d’un tiers le commerce maritime. Par ailleurs, la transformation des sirops en tafia porterait fortement atteinte à la consommation des eaux-de-vie du Royaume. Ces accusations sont d’autant plus fortes qu’à partir de 1752, il est autorisé d’entreposer les guildives et tafias acquis lors des prises en mer, dans les entrepôts des ports français à condition que ceux-ci soient réexportés à destination de l’Afrique.
La Guerre de Sept ans rebat les cartes
La Guerre de Sept ans (1756-1763) ralentit le commerce mondial. La venue des navires ennemis, notamment anglais, est naturellement interdite. Les bâtiments neutres peuvent exporter des denrées coloniales issues des colonies françaises, en remplacement des navires français occupés à la guerre. Eugène Guénin, nous rapporte dans son livre La Nouvelle-France de 1898, une anecdote relative au rhum.
Rumporter
Édition septembre 2018