Nous vous proposons aujourd’hui, non pas de parler de rhum, mais de parler de la matière première, à savoir la canne à sucre. Beaucoup de pays dans le monde peuvent s’enorgueillir de cultiver cette graminée sur leur sol. Sur le continent européen, l’Espagne est le dernier pays à la cultiver de manière conséquente. Pourtant la canne à sucre fut présente à une époque dans tout le bassin méditerranéen, en France métropolitaine inclus.
Aujourd’hui la canne à sucre évoque, pour nous européens, beaucoup plus les Antilles ou l’Amérique Latine, alors que sa terre d’origine est l’Asie. Les conditions d’émergence de la canne à sucre font débat depuis plusieurs siècles. Aujourd’hui, il paraît établi que la canne à sucre vient de Nouvelle-Guinée.
Elle aurait traversé l’Asie, l’Europe puis l’Atlantique. Mais l’historiographie de la canne à sucre montre que nos connaissances peuvent – et vont – encore évoluer dans le futur, tout comme elles ont évolué depuis des siècles. C’est pourquoi nous proposons un récit historique de la canne sucre, forcément imparfait, et non pas l’Histoire ferme et définitive, de cette graminée.
Notre présentation sera divisée en deux grandes parties. La première partie, historique, sera consacrée aux voyages de la canne à sucre depuis l’Antiquité jusqu’aux aux évolutions variétales. La seconde présentera l’actualité de la canne à sucre dans le monde, à savoir l’état de la recherche génétique, ainsi que différents centres de recherches de la canne à sucre dans le monde.
Le débat des origines à travers les siècles
En 1789, M. F. Le Breton, publie un Traité sur les propriétés et les effets du sucre, dans lequel il écrit : « Il est même certain que, outre le Bambu, notre canne à sucre était connue de toute antiquité dans les Indes et dans l’Afrique (…), que Lucain a voulu la désigner par l’épithète de « tendre », qu’il donne au roseau dont les Indiens expriment un suc doux, et que Juba assure, au rapport de Pline, qu’on voyait dans les Iles Canaries des arbres semblables à la férule dont on exprimait une liqueur agréable à boire.
Ce n’est donc pas vers le douzième siècle, (…) que cette plante précieuse a passé de la Sicile en Espagne et dans les Canaries, ni qu’elle y a été naturalisée, elle y était indigène (…) ». L’auteur de ces lignes nous présente ici deux des cinq origines de la canne à sucre présentées au cours de l’Histoire, à savoir l’Inde et les Canaries. Il en écarte une qui pourtant existait à son époque. Nous commencerons par celle-ci, à savoir l’Amérique.
Le Père Labat, dans son « Nouveau voyage aux Isles de l’Amérique » publié en 1724, estime que la canne à sucre serait une graminée indigène dans le Nouveau Monde. Il « défie qu’on puisse lui prouver qu’elles (ndlr : les cannes) ont été apportées de dehors ». Cette idée de Canne indigène en Amérique a perduré jusque dans les années 1970. Si elle est aujourd’hui totalement abandonnée c’est que nous connaissons le parcours des premiers colons espagnols et que nous estimons plus que probable qu’ils aient planté de la canne sur leur trajet, y compris dans les Petites Antilles délaissées par la suite.
Cet article est issu de l’édition Rumporter de septembre 2019
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