Et oui, j’ai la chance d’avoir rencontré Gregory Vernant qui était de passage sur Paris. Une entrevue d’environ deux heures durant laquelle nous avons pu aborder plusieurs points que je vous retranscris sous forme d’interview.
GV : Rien de bien extraordinaire, j’ai fais des études de commerce sur Paris. Après le décès de mon grand-père lorsque ma mère, alors médecin, s’est mise en disponibilité pour s’occuper de la distillerie familiale, il m’est apparu naturel de la rejoindre. J’ai toujours baigné dans l’atmosphère de la distillerie. J’étais jeune et ne m’intéressais malheureusement pas à tous les aspects, ce que je regrette maintenant, mais c’est une maison familiale et il était pour moi évident d’y travailler.
L’intérêt principal est que ce travail revêt plusieurs casquettes, Je peux faire de l’agriculture, du commercial, de la dégustation, je voyage beaucoup… il y’a tant à faire. Nous avons cette chance chez Neisson de toucher à tout et un peu comme un fan de triathlon qui un jour n’a pas envie de courir peut aller nager, je peux diversifier mes activités. J’essaye également de constituer une base de données, laisser une trace. Avant 1950, et ce n’est pas valable que pour Neisson, il n’y avait que très peu de traces écrites en Martinique. Les transmissions de savoirs étaient essentiellement orales. C’est en cela que je disais regretter de ne pas m’être d’avantage intéressé aux travaux de mon grand-père étant plus jeune. C’est une partie du patrimoine qui est perdue. Je souhaite donc remédier à cela afin que les générations futures ne soient pas confrontées aux mêmes manques.
OD : Vous parlez d’avant 1950. Pourriez vous justement nous en dire plus sur cette période ? C’est en 52 que la colonne Savalle fut installée, comment distilliez avant ?
GV : Très bonne question. Et c’est amusant car j’ai justement rachetée aux enchères l’ancienne colonne l’année dernière. Il s’agissait d’une colonne de type créole. Mais comme je le disais, peu d’informations subsistent de cette période. La colonne Savalle est le fruit du travail et des idées de mon grand-père qui était un vrai visionnaire. Il était chimiste avant toute chose et c’est sa formation qui a permis à NEISSON de se développer. Il a bien sur travailler sur la colonne et les échanges à l’intérieure de celle ci, mais également sur les levures. Ce qui intéressait c’était les réactions chimiques plus que le produit final. Le processus et son optimisation. C’est grâce à cette approche que les rhums NEISSON ont pu se développer face à la concurrence. C’est d’ailleurs à lui que l’on doit également le design des « Zépol Karé » la même année et qui est aujourd’hui l’ identité visuelle de la marque. Il souhaitait déjà à l’époque se démarquer des autres. Chimistes et doué pour le marketing. Un visionnaire je vous dit.
OD : Avant l’AOC vous pratiquiez une fermentation longue de 5 jours. Cette durée fut interdite par le cahier des charges mais récemment une révision de celui ci le permet de nouveau. Pensez vous revenir à cette méthode ?