Le 2 avril dernier, le président des États-Unis d’Amérique, Donald Trump présentait au monde une liste de pays dont les droits de douane seraient surtaxés.

Membre de l’Union Européenne, la France se voyait appliquer une augmentation de la douloureuse de 20 %… Sauf que la situation était différente pour la métropole (20 % donc), et les Outre-Mer. Ainsi, les Antilles françaises (Martinique, Guadeloupe), mais aussi la Guyane et Saint-Martin, étaient taxées qu’à hauteur de 10 %, car ces territoires bénéficient en effet d’un régime de TVA différencié, prévu par le code des impôts, et présentent un déficit commercial vis-à–vis des USA.
Ils sont donc considérés comme à part, presque autonomes par l’administration américaine. Ils s’en sortaient relativement bien comparé au reste du territoire français, notamment de la Réunion (37 %), qui présente un solde positif vis-à-vis du commerce avec l’oncle Sam. Dans la même « logique », la Polynésie française et Saint-Pierre-et-Miquelon qui ne font pas partie de l’UE et n’ont pas le même régime fiscal que les DROM, se voyaient respectivement appliquer une surtaxe de 10 et 50 %… Comprenne qui pourra.
Machine arrière
Mais le 9 avril, le président américain faisait machine arrière et revenait à une surtaxe générale sur les droits de douane de 10 % pour tout le monde (à part la Chine). Alors, que retenir de cette séquence ? Que Donald Trump est imprévisible, bien sûr, mais surtout que quoi qu’il arrive, commercer avec les USA sera encore plus difficile dans les années à venir.
Et ça, c’est une mauvaise nouvelle pour les producteurs de rhum français, même s’ils sont relativement peu exposés au risque américain… faute d’avoir pu pénétrer son marché. Du fait de la difficulté d’expliquer le rhum français (agricole et de mélasse) comparativement peu sucré à des consommateurs dopés au sucre et plus cher, ou à la complexité de commercer aux USA, où les règles changent selon les Etats.
Peu d’impact à court terme
Reste que tous les territoires français producteurs de rhum pourraient être impactés par ces 10 % supplémentaires lorsqu’ils exportent aux USA. « Pourraient », car la plupart du temps, ce n’est pas le cas. « Les rhums réunionnais ne sont pas présents sur le marché américain actuellement. Mais cette hausse des taxes à l’entrée du marché américain est une mauvaise nouvelle.
Les États-Unis sont un des plus gros marchés mondiaux pour la consommation d’alcool, malgré des tarifs déjà élevés. Cette augmentation des droits de douane complique fortement les potentiels projets de développement sur ce territoire, par ailleurs déjà difficile d’accès pour les entreprises réunionnaises » nous répond. Emilie Marty, secrétaire générale de La Réunion des Rhums.
Même son de cloche au niveau de la Guyane. « Nous n’exportons pas de rhum guyanais vers le USA…en tout cas, pas encore, rappelle Grégoire Gueden, pour le groupe GBH. En revanche, une part significative de nos ventes de rhum Clément et de JM de Martinique partent vers ce marché que j’ai filialisé depuis 15 ans via notre filiale Spiribam USA. »
Les marques du groupe GBH et quelques autres devraient en effet être directement impactées. Pour les autres, cela risque de compliquer l’entrée sur le gigantesque marché américain déjà difficile d’accès…
Peur sur le spiritourisme !
« Nos rhums sont déjà positionnés sur un segment tarifaire supérieur à celui de nos concurrents américains, qui bénéficient par ailleurs d’une fiscalité extrêmement avantageuse. En 2021, ce sont près de 700 millions de dollars de taxes sur les rhums qui ont été reversés à ces acteurs locaux, renforçant leur compétitivité, rappelle le président du Coderum, Jérôme Froget. L’augmentation de ces droits de douane est synonyme d’inflation et de baisse du pouvoir d’achat des consommateurs américains. Cela pourrait entraîner une diminution de la fréquentation touristique de cette clientèle, avec pour conséquences un frein à la valorisation spiritouristique de notre patrimoine du rhum, et un ralentissement significatif du développement international des Rhums de Martinique. »
Affaire à suivre donc…
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