Maintenant que nous avons survolé l’histoire de la distillerie et vu comment elle a opéré sa montée en gamme, tâchons ensemble de comprendre comment sont produits les rhums. Rencontre avec Ruidjy Boundo, le directeur de production de Montebello.
Parlez-nous de la matière première des rhums Montebello ?
Nous sommes une distillerie de rhum agricole en Guadeloupe, notre matière première est donc la canne à sucre. Nous nous en procurons auprès de planteurs avec lesquels nous travaillons en étroite collaboration.
Ce contact et cette proximité sont essentiels pour Montebello car ils permettent à la fois d’être à l’écoute des planteurs et de nous assurer que la qualité de la canne à sucre est respectée. Les principales variétés que nous utilisons sont la canne verte, rouge et jaune. Mais nous travaillons avec toutes sortes de cannes, principalement pour des projets spécifiques, comme la canne noire ou la bleue.
D’où viennent ces cannes à sucre ?
Nos cannes à sucre proviennent de planteurs qui travaillent sur leurs terres un peu partout en Guadeloupe. À savoir que notre belle île est séparée en 2 îles distinctes : Grande-Terre et Basse-Terre, ayant chacune des terroirs bien spécifiques, donc des cannes différentes.
Nous aimons mettre en avant cette diversité et nous travaillons donc avec la Grande-Terre et la Basse-Terre (pour des cannes particulières comme la canne noire par exemple). La canne peut être ou coupée à la main, dite canne longue, ou par des machines (en tronçons de 20 cm environ).
Une fois les cannes coupées, que deviennent-elles ?
Les cannes à sucre sont coupées et acheminées directement à la distillerie. Nous vérifions bien qu’elles correspondent à notre cahier des charges, nous vérifions si le brix correspond aussi. Plus le brix est élevé, plus la canne à sucre est sucrée, plus il est intéressant dans le processus de fabrication.
En moins de 24 h, les cannes à sucre sont prises en charge et le processus de fabrication peut commencer. Le hachage et le broyage sont les premières étapes. Elles sont réalisées grâce à notre moteur de locomotive de type Hamilton.
Nous sommes très fiers de cette vieille dame datant du XIXe qui propulse notre distillerie à la vapeur grâce à l’énergie crée par le brûlage de la bagasse. C’est unique en Guadeloupe continentale.
Comment se passe l’étape de la fermentation ?
Après le broyage, le jus de canne est directement transféré dans les cuves de fermentation. L’étape de la fermentation dure entre 48 et 72 h. Celle-ci est activée naturellement par le processus de pied de cuve.
Nous laissons une partie de la production précédente en bas de cuve. C’est la canne longue qui vient l’alimenter. La canne hachée sera quant à elle rajoutée à ce fond de cuve et permettra de faire du volume. Le fond de cuve est constitué d’environ 10000 litres de jus de canne frais broyé du jour.
Et le lendemain, on va venir remplir cette cuve avec 35000 litres. Et le surlendemain, je pourrais procéder à la fermentation. Nous utilisons des cuves qui peuvent contenir entre 35 000 et 45 000 litres en inox, ouvertes. En général, elles sont brassées dès qu’elles sont remplies. Elles le sont à 80 % de leur capacité environ.
Et quid de la distillation ?
Après fermentation, notre vin de canne titre entre 6 à 8% vol. Nous allons procéder à la distillation. Notre belle colonne a été récemment rénovée et trône fièrement au centre de la distillerie.
Grâce à cette rénovation et aux nombreuses autres que nous sommes en train de mener, nous avons pu tripler notre production annuelle tout en améliorant la qualité de nos rhums, avec un contrôle de qualité strict.
À quel degré sort le rhum ?
Le rhum sort de la colonne à un degré d’alcool de 80 %. Chaque jour, nos équipes dégustent cette production. C’est un moment crucial qui permettra par la suite de classer ces rhums bruts de colonne selon leurs arômes dominants : herbacé, doux, piquant, sucré.
Il est temps maintenant que notre rhum se repose pendant deux semaines en cuves. C’est après ces 2 semaines qu’une autre dégustation est faite afin de déterminer le futur de notre produit : brut de colonne, blanc premium, mis en vieillissement.
Comment se passe le vieillissement ?
Je travaille en étroite collaboration avec Paul Timon sur le vieillissement de nos rhums. Le rhum blanc est d’abord stocké dans des cuves inertes et brassé avec de l’air comprimé pendant deux mois afin de se débarrasser de certaines molécules d’alcool agressives.
Après cette étape nous commençons une réduction alcoolique lente, le degré du rhum va dépendre du compte d’âge que nous recherchons. Plus loin nous souhaitons aller dans les comptes d’âge, au plus haut en degré nous mettons en fûts.
Nous utilisons majoritairement d’anciens fûts de bourbons, mais également des fûts roux ex-Cognac, du chêne français neuf, et quelques fûts atypiques pour la gamme la Rencontre. La plus grosse spécificité dans notre manière de faire vieillir nos rhums provient du chai en lui-même.
Il prend place dans d’anciens conteneurs en acier. Directement frappés par le soleil, les fûts se trouvant à l’intérieur subissent des conditions de maturation extrêmes. Chaleur, humidité et changement important de température entre le jour et la nuit vont accélérer l’interaction entre le bois et le rhum.
Cela va conférer le profil aromatique unique de nos rhums vieux et nourrir avec grande générosité les anges, qui sont déjà très gourmands aux Antilles…
Comment choisissez-vous les fûts français que vous utilisez ?
Paul va sur le terrain dans les domaines et tonnelleries pour réaliser les sélections. Il faut que le vin ou le spiritueux nous plaisent, et que le producteur se distingue dans l’originalité ou la qualité de ces produits.
Le rhum est ensuite sélectionné en fonction des profils aromatiques de l’ancienne contenance du fût. L’idée est de créer une rencontre gustative entre deux univers, deux producteurs et deux savoir-faire. Pour les cuvées haut de gamme, nous sélectionnons parmi nos meilleurs rhums vieux et dégustons en équipe, afin de faire un choix cohérent satisfaisant tout type de palais.
Quel est le profil des rhums Montebello ?
Nous sommes fiers de nos 5 nouvelles médailles d’or au concours Spirit Selection de Bruxelles. Ce qu’on recherche avant tout ce sont des produits de qualité, grâce à l’innovation tout en gardant l’ADN des rhums Montebello.
Nous voulons faire perdurer dans les rhums Montebello, ce côté fruité, végétal et rond à la fois. On veut qu’il ait du caractère, mais qu’il puisse plaire à tout le monde.