Découvrez le rhum au Québec et au Canada 2/2

Au Nouveau Brunswick, la distillerie Fils Du Roy travaille actuellement sur un dossier fortement intéressant. Les deux frères entrepreneurs, Jonathan et Sébastien, ont mis en barrique un rhum distillé à l’aide de deux types de mélasse. La première étant Fancy et l’autre étant Verte. Cette dernière a tendance à donner un coté plus ferreux au spiritueux en question. Suite à la distillation, le tout est mis en barrique pour une période de plus ou moins dix-huit mois à 80% d’alcool par volume dans une barrique de bourbon dans le but d’aller chercher le plus d’arômes fruités et fumés possible. Le tout devrait voir officiellement le jour en 2017.


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ironworks-rumDirigeons-nous ensuite dans l’est canadien plus particulièrement à Lunenberg, Nouvelle Écosse. Dans cette superbe ville, vous y trouverez Ironworks Distillery. Cette distillerie a été créée il y a plus ou moins six ans par deux anciens radiologistes de Toronto. Ils avaient le rêve de retourner dans leur coin de pays dans le but de construire des spiritueux dignes de leur culture. Ironworks est né ! En matière de rhum, cette distillerie vous offre quatre variétés toutes faites à base de mélasse. Vous avez accès à un rhum blanc très aromatique, un rhum ambré vieilli dix-huit (18) mois en barrique de chêne neuve (très hispanique comme rhum), un rhum ‘’dark’’ qui est en fait une version plus sucré de l’ambré (très similaire au Gosling des Bermudes) et à une version ‘’single cask’’ vieillie cinq ans. Dans la même province, les gammes Sea Fever et Fotress sont aussi disponibles. Au niveau de ces gammes, elles sont aussi issues d’un assemblage de rhums des Caraïbes vieillis en barrique.

Dans la province de Terre Neuve et Labrador, une gamme de rhum gagne grandement en popularité, Iceberg. Elle n’a rien d’impressionnant à première vue. On parle d’un rhum de Demerara dilué à une eau pure de la province. C’est justement cette eau qui attire toute l’attention. La gamme de spiritueux Iceberg se veut d’être des assemblages avec une eau de glacier. Vous avez tout compris. Le fondateur de la distillerie Iceberg a bel et bien fait l’achat de navires dans le but de prendre des morceaux de glacier qui, une fois liquéfiés, serviront à diluer l’alcool. Le même principe est fait avec le Newfoundland Screech qui est en fait construit à partir d’un rhum jamaïcain.

Dans la province de l’Ile du Prince Edward, nous pouvons y trouver la minuscule distillerie Myriad View. Cette distillerie est le fruit de quatre entrepreneurs qui distillent à temps perdu. Bien sûr, ils ont plusieurs produits comme vodka, gin, whisky et rhum. Construit à l’aide d’un distillat 100% mélasse, les deux versions (40% et 57%) sont très peu aromatiques et très peu gouteuses.

last-moutain-rum

Un peu plus à l’ouest du Québec, en Saskatchewan, on retrouve deux distilleries. La première, Last Mountain est l’une des plus reconnues pour ses whisky mais reste que leur rhum est intéressant. Elle nous l’offre en quelques versions et ce, avec la même conception. Que ce soit avec l’ambré, le vieilli (cinq ans) ou même le spiced. Sinon, dans cette province nous avons aussi droit à la première distillerie ‘’millionnaire’’ au Canada avec Lucky Bastard Distillery. Cette distillerie est grandement populaire pour son gin ainsi que sa vodka mais reste que de plus en plus de rhum Knock On Wood se fait vendre à la fabrique. Ce rhum a la particularité d’être fait de mélasse directement de la Barbade mais aussi d’un jus de canne. De plus, le Knock On Wood bénéficie d’un vieillissement en barrique de bourbon pour plus ou moins dix-huit (18) mois. C’est sur le caramel et la marmelade épicée que ce rhum s’offrira à vous.

brum-rumSi nous nous dirigeons dans l’ouest canadien, aucun réel rhum n’est conçu. Bien sûr, si vous vérifiez les réseaux sociaux, vous risquez de trouver un rhum fabriqué par la distillerie Wayward en Colombie Britannique. Mais libre à vous de me dire si c’est un rhum puisque le tout est fait à partir d’un miel d’abeilles, que nous mélangeons à un caramel afin de fabriquer une sorte de mélasse. Le tout est distillé et mis en barrique selon les normes canadiennes (minimum un an). Ceci étant dit, les normes canadiennes le mentionnent de façon très claire : un rhum doit être fabriqué à l’aide de la canne à sucre ou d’un dérivé de la canne à sucre tel que de la mélasse ou du sirop de canne. Donc comment est-ce possible pour la distillerie Wayward de commercialiser ce rhum ? Bonne question ! En Alberta, la distillerie Big Rig procède de façon similaire. Par contre, la distillerie elle-même le mentionne ‘’Ceci n’est pas un rhum mais un spiritueux rhum-style fait à base de mélasse de betterave’’. Vous avez bien lu ! Pour Mike et Geoff, il était plus qu’important de fabriquer des spiritueux à base du terroir directement. Ceci dit, ils ont fabriqué une mélasse à l’aide de betteraves locales et produisent le BRUM à l’aide de celle-ci. Encore une fois, la distillerie ne dira jamais qu’il s’agit d’un rhum… Heureusement.

D’accord Yan… Mais le marché du rhum, il est comment chez vous?

En 2015, la vente des spiritueux à égaliser les ventes du vin rouge au Québec. Une première en quinze ans. Avec une augmentation de 4.3% contrairement à l’année précédente, le rhum représente aujourd’hui 20.8% des ventes de spiritueux. La culture des spiritueux, étant ce qu’elle est au Québec, est davantage axée sur les rhums de mélasse que sur les rhums agricoles. D’abord, il faut effectivement regarder la demande. En matière de rhum, le consommateur canadien est très souvent porté à associer rhum avec Cuba et/ou Jamaïque alors qu’en France, le mot rhum rime plus souvent avec la Martinique et Guadeloupe.

Ceci dit, les rhums de mélasse sont favorisé par la demande. De plus, il faut aussi prendre en considération le laboratoire de la SAQ. Ce dernier impose une limite de cent cinquante (150) parties par milliard (PPB) de carbamate d’éthyle au spiritueux alors que les eaux-de-Wayward-Honey-Rumvie et les liqueurs ont une limite de quatre cents (440) PPB sur le même dossier. Ceci freine grandement certaines distilleries sur le marché du Québec voire même canadien. Dans le but de pouvoir se conformer à cette règle, plusieurs sociétés/distilleries doivent apporter des changements considérables à leurs établissements et/ou chaînes de productions. Investissement qui est généralement trop grand pour la part du marché qu’ils ou elles obtiendront en Amérique du Nord. Ceci dit, certains réussissent à trouver la bonne voie et se faire disponible et ce, aux grands bonheurs des amateurs. Nous n’avons qu’à voir les produits de Bielle, PMG, Longueteau, Trois Rivières, La Mauny, Saint James et même Issan! Mais encore une fois, reste que les grands vainqueurs en matière de vente sont toujours les rhums de mélasse comme Captain Morgan, El Dorado, Kraken, Appleton et Plantation.

Heureusement, l’engouement commence à se faire très palpable face à l’industrie du rhum de ‘’dégustation’’. C’est d’ailleurs pour cette raison que je voyage le Québec et l’Ontario afin d’éduquer les consommateurs sur une telle industrie. Nous pouvons aussi constater une solide présence en matière de communautés. Nous n’avons qu’à regarder le groupe de Québec Rhum qui, de façon mensuelle, organise d’incroyables dégustations. À Montréal, une communauté se met aussi en place avec un club de dégustation plus qu’impressionnant mais aussi plusieurs rhumeries et/ou établissements mettant en vedette l’industrie du rhum.

Et qui sait, peut-être un jour aurais-je la chance de vous présenter en France ces rhums canadiens et vous expliquer davantage cette folle réalité qui nous habite !


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