Déjà quatre années que Maxime Hoerth officie au bar du palace Le Bristol à Paris. A tout juste 30 ans, ce chef barman a déjà réussi plusieurs challenges : gagner le titre du premier Meilleur Ouvrier de France (MOF) en 2011, hisser au premier rang des bars d’hôtel le Bristol après sa réouverture en 2012 dans une scène cocktail parisienne en pleine effervescence, et devenir l’auteur de l’un des premiers beaux livres de mixologie, « Cocktails – Maxime Hoerth, Le Bristol Paris »
Réalisé par la photographe Virginie Garnier (également collaboratrice de « Les nouveaux classiques cocktails » de Frédéric Le Bordays) assistée de Caspar Miskin et par la styliste Aline Caron, cet ouvrage réunit au gré des saisons des recettes aux saveurs subtiles et élégantes, fruit d’un travail d’équipe de longue haleine. Le rhum en est bien sûr l’une des vedettes. Rencontre avec cet artiste du bar.
Après être devenu MOF barman, qu’est-ce que cela fait de devenir l’auteur d’un livre de cocktails ?
MOF et auteur représentent deux choses très différentes mais l’écriture de ce livre a été une aventure très sympathique avec une belle équipe. C’est un projet que nous avions depuis longtemps avec notre ancien PDG Mr Didier Le Calvez. Pour mettre en œuvre ce livre, nous devions étoffer notre carnet de recettes. L’anniversaire des trois ans du bar était l’occasion idéale pour publier cet ouvrage. Pour le concept, nous avons pris le parti de suivre la ligne directrice de la carte du bar, des créations accessibles, esthétiques et originales au fil des saisons. Quant à la sélection, nous avons choisi les recettes les plus plébiscitées par nos clients : les classiques, les classiques revisités à notre façon, et des créations. Le rythme du shooting a été très dense : 80 photos en trois semaines. Bien sûr, j’aime beaucoup réaliser des cocktails mais j’affectionne également son côté mise en scène. Je discute beaucoup avec les photographes, en essayant de leur livrer un visuel clé en main, sublimé par un verre élégant, une couleur de cocktail et une décoration attrayante. Avant tout, nous souhaitions réaliser un livre plus focalisé sur l’esthétique que sur les recettes de cocktails.
Comment as-tu réalisé ta sélection de cocktails au rhum selon les saisons?
Le rhum est présent dans chaque partie sauf pour le chapitre printemps où nous avons privilégié des alcools comme la tequila, le pisco ou la vodka au style plus printanier (ndlr : un rhum agricole dont la canne est récoltée au printemps aurait pu faire l’affaire !). Avec le rhum, j’ai joué autour de grands classiques que j’ai réinterprétés à la manière du Bristol comme ces deux cocktails d’été, le Maï Taï twisté avec le Foursquare Spiced. Et également le Sweet Vacation inspiré d’un rhum raisin composé de deux infusions à base d’Appleton Estate 12 ans, l‘une aux raisins secs et l’autre à la cannelle.
Quel type de détails as-tu souligné pour le stylisme des cocktails au rhum ?
Nous avons utilisé essentiellement des produits exotiques et des épices : l’ananas, la badiane, la cannelle, l’hibiscus et des agrumes séchés… tout ce qui s’apparente aux îles en greffant notre signature. Question verrerie, nous avons exploité toutes les formes existantes sauf le verre à tiki. Mais nous avons en cours un projet de création avec ce verre exotique en céramique, en gardant bien sûr les codes chic du Bristol.
Comment as-tu adapté tes recettes pour le grand public ?
Il était primordial que le lecteur ayant apprécié le cocktail au bar, puisse le réaliser facilement et de façon ludique chez lui. Nous avons diminué toutes les doses de manière domestique pour être dans un esprit de consommation responsable. Tous les ingrédients sont ceux utilisés au bar comme les marques de spiritueux avec lesquels nous travaillons. D’ailleurs, nous avons travaillé avec des rhums légers tels qu’Appleton, facile à utiliser avec de nombreux cocktails. C’est un produit versatile avec du caractère. D’autre part, nous avons simplifié des techniques comme les infusions, ici nous travaillons avec un appareil à mise sous vide, dans le livre nous avons adopté le bain-marie.
Tu as travaillé avec Virginie Garnier sur ce livre mais as-tu des photographes de prédilection ?
Oui j’aime beaucoup le travail de personnes comme Philippe Martineau (ndlr, qui a travaillé entre autres sur le livre du Bar Le Forum), Vincent Anceaume, Philippe Levy, Addie Chin et Dan Malpass.
Quelle est ta première histoire d’amour avec le rhum ?
Il m’est un peu compliqué de répondre à cette question car c’est un spiritueux que je découvre au fur et à mesure. Ce sera à la fin une grande histoire d’amour mais nous sommes timides et n’avons pas encore fait entièrement connaissance ! A l’origine, j’ai un palais plus sensible au gin et au whisky. Mon premier souvenir remonte à l’époque de mes études d’hôtellerie. J’avais gagné le concours « Shaker d’or » et j’ai eu la chance de partir à la découverte de Cuba avec Havana Club. J’ai gardé en mémoire cette ambiance autour du rhum et les dégustations de daïquiris au bar du Floridita et de la Bodeguita del Medio à La Havane (ndlr: les adresses de prédilection d’Ernest Hemingway). C’était magique !
Te rappelles-tu de ta première création à base de rhum ?
Difficile de me souvenir de la première très exactement… je me souviens en tout cas d’une des premières qui en valait la peine ! C’était un dérivé de Rum Manhattan avec une base de Bally 7 ans, compote de figue Dubonnet, Drambuie, et Angostura bitters.
Es-tu plutôt dégustation ou cocktail question rhum?
Plutôt dégustation (Clément, Bally, Longueteau, certains Mezan, Bristol, Velier également et plus récemment Don Q en brut de fût) mais j’affectionne aussi les rhums légers et les rhums agricoles en cocktail. Cette dernière catégorie apporte un goût marqué et plus de peps à une boisson. Et j’aime les short drinks qui ne laissent pas indifférents. Sur l’été, je réalise des dérivés de Daïquiri et de Crusta très désaltérants alors qu’en hiver je mets en avant des rhums Old Fashioned et le Between The Sheet, une base de sidecar, moitié rhum et cognac. A contrario, je ne suis pas un adepte des cocktails tiki : les mélanges à outrance ne correspondent pas à mon style, je préfère aller à l’essentiel en misant sur le côté épuré.
DECOUVREZ EN IMAGES LES CREATIONS RHUM DE MAXIME HOERTH
Quelle technique utilises-tu avec le rhum ?
Le rhum se positionne comme un spiritueux assez compliqué à travailler, lié à sa forte palette aromatique et un caractère marqué. Je joue surtout avec des infusions bien que certaines ne fonctionnent pas vraiment notamment avec la rhubarbe.
Où trouves-tu tes sources d’inspiration pour des cocktails au rhum ?
A travers le travail de mes collègues et différents ouvrages spécialisés (de mes voyages en Amérique latine ou dans les Caraïbes). J’en extrais des recettes pour ma part inconnues, je les fais goûter à mon équipe et nous les travaillons ensemble pour la réinterpréter. Comme le rhum n’est pas mon spiritueux de prédilection, je connais assez mal les recueils autour du rhum. Actuellement, je réalise des recherches sur le Club des Cantineros cubains. Nous réalisons seulement 10 % des cocktails par rapport à ce qu’il existe dans la culture mixologie cubaine. J’ai notamment beaucoup d’admiration pour Julio Cabrera, barman cubain emblématique basé à Miami. Il représente parfaitement la culture des Cantineros.
Quels cocktails as-tu imaginé autour du rhum pour cet été ?
Nous proposons notre cocktail signature, le Bristol Old Fashioned N°10 (aka Bounty Old Fashioned), à base de rhum Appleton, le Fat wash avec une huile de coco bio, un trait de Plantation Original Dark Overproof pour une petite touche de puissance et du Scrappy’s bitters chocolat. Mais aussi un Pain Killer Frozen à base de spiced rum que nous avions déjà créé pour une soirée sur le thème « Saint-Barth ».
Encore une belle aventure avec le rhum cet été au bar du Bristol.
« Cocktails » – Maxime Hoerth
Le Bristol Paris
21 x 29 cm – 192 pages – 30 €
Editions Solar
En vente en librairie et sur la boutique en ligne : www.lebristolparis.com
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