À l’occasion de leurs 10 ans, Rumporter se demande où en sont les indications géographiques du rhum français (hors AOC Martinique qui fera l’objet d’un prochain article). Comment ont-elles boosté les efforts des producteurs français pour spectaculairement améliorer la qualité des rhums, comment elles agissent comme une protection, comment elles peuvent parfois être excluantes et comment elles pourraient éventuellement être améliorées.

L’Europe reconnaît actuellement six indications géographiques françaises pour le rhum. Elles reprennent les règles générales fixées par l’UE et vont plus loin sur un certain nombre de points. L’IG Rhum des départements français d’outre-mer est la plus libérale d’entre elles en ce sens qu’elle autorise les assemblages de rhums issus d’un ou plusieurs départements français producteurs : Martinique, Guadeloupe, Réunion et Guyane, soit d’environ 120 communes.
L’IG Rhum des Antilles françaises permet une élaboration de diverses façons : matières premières originaires de Martinique et de Guadeloupe, distillées ou non sur l’île d’origine, assemblages de rhums des deux îles… Ces deux IG ne sont pas liées à terroir particulier, mais plutôt à une appartenance administrative (les DROM), ou à une aire géographique (les Antilles françaises).
Si elles permettent les expérimentations et les innovations (en mélangeant différentes origines), elles s’éloignent de la vocation historique des IG : représenter un territoire. Les autres IG : Rhum de sucrerie de la Baie du Galion (Martinique, mélasse), Rhum de la Guadeloupe (concerne les rhums agricoles et de mélasse), Rhum de la Réunion (concerne les rhums agricoles et de mélasse et le grand arôme), Rhum de la Guyane (concerne les rhums agricoles), définissent au contraire des aires d’application circonscrites à un territoire donné.
Un gage de qualité
Les règles édictées par les différents producteurs (aiguillonnés par l’INAO) vont en général vers un mieux-disant qualitatif, ce qui a pour conséquence d’élever le niveau de qualité des produits. Si le niveau général des rhums des DROM a connu une aussi spectaculaire montée en gamme depuis une vingtaine d’années, c’est en partie grâce aux processus liés à l’adoption des IG et de l’AOC Martinique.
C’est une garantie que tous les producteurs d’une aire donnée jouent le jeu selon les mêmes règles de base, et font face aux mêmes contraintes réglementaires. C’est aussi une protection contre les usurpations ou les fraudes. « Par exemple, un producteur qui ne fait pas ses rhums à la Réunion ne peut pas se prévaloir du nom de notre île », analyse Marie Ferrand la maître de chai d’Isautier.
Une protection pour le consommateur
C’est aussi un gage de qualité et une protection pour le consommateur. « Quand un client achète un produit sur lequel il y a marqué “Rhum de Guadeloupe”, il sait qu’il est sans sucre ajouté, qu’il n’a pas reçu d’intrants, qu’il a été produit selon un cahier des charges strict (variétés de canne, respect des sols, niveau de distillation…) et qu’il répond à une certaine palette aromatique qu’il connaît bien, estime Paul Timon, ambassadeur et coresponsable des chais de la distillerie Montebello. Le consommateur ne tombera pas sur un rhum distillé en multicolonne qui sortira à 95 % et qui n’aura aucun goût dans lequel on aura ajouté du caramel, du sucre et des arômes. »