Cocktail cubain par excellence mais pestiféré des bars à cocktail de haute mixologie, le mojito redore cet été son blason avec l’excellent ouvrage « Mojito Remix » aux Editions Hachette Vin*. Comment est-il travaillé cet été ? Petite enquête auprès de son auteur Jérémy Auger et de barmen de différents horizons.
Malgré la grande déferlante du spritz Apérol et le nouvel engouement du gin tonic, on vous le confirme : le mojito reste le cocktail chouchou des consommateurs français. Et pourtant l’image de ce cocktail s’est largement dégradée au fil du temps, au point de disparaître de la carte de nombreux bars à cocktails.
«Le mojito a été martyrisé par certains bars et barmen si bien qu’il est malheureusement considéré aujourd’hui comme un cocktail cheap sans intérêt créatif et gustatif» explique Jéremy Auger auteur de Mojito Remix, un recueil de 50 variations de mojitos par différents établissements de tout l’hexagone.
« Ma mission était de prendre le contre-pied vis-à-vis de ce phénomène et de trouver des barmen qui revendiquent sans complexe la réalisation de mojitos dans leur établissement. La plupart des recettes du livre viennent de bars d’hôtels habitués à une clientèle en quête de ses repères gustatifs et appréciant les classiques twistés, contrairement aux speakeasies où les amateurs de cocktails cherchent à bousculer leur habitudes de consommation dans des créations inédites. Aujourd’hui, on twiste le mojito avec des apéritifs français tels que la Suze, le Calvados ou la Chartreuse et on le complète avec des épices en rappel à ses origines. L’important dans un mojito, c’est de retrouver la fraîcheur et un bel équilibre. »
Rumporter mène l’enquête
Suite à la lecture de cet excellent ouvrage, la rédaction de Rumporter a sondé quelques établissements : réalisent-ils encore ce breuvage et comment le sublime-t-il cet été ? Réponses négatives pour la plupart des barmen de la nouvelle génération cocktail à quelques exceptions près comme Eric Sabloniere du groupe Experimental Cocktail Club : « je travaille le mojito version smash. Tu conserves les mêmes ingrédients mais tu les frappes au shaker. Le rhum est aux choix du client mais j’aime partir sur deux rhums. En blanc : Plantation Rum 3 Stars et le rhum de Haïti Clairin Casimir. Je le sers dans un verre rock ou double avec trois glaçons ou un dôme de glace pilée sans eau gazeuse.»
Pour les barmen de restaurants branchés comme Dante Roberto à la pizzeria Louie Louie du groupe Liquid Corp (Dirty Dick, Moonshiner….), c’est oui sans d’hésitation « je le prépare de manière classique, au pilon pour extraire parfaitement l’essence de tous les ingrédients. On peut s’amuser à le twister avec un soda comme dans cette recette à base de rhum cubain, de citron, de concombre, ginger beer, de sirop de fleur de sureau pour donner un côté floral. »
Et les bars d’hôtel
Du côté des bars d’hôtel, comme l’a confié Jérémy Auger, ce cocktail cubain a la côte. Au groupe Mama Shelter, C’est 58 400 mojitos réalisés pour une année ! D’ailleurs, le Mama de Lyon offre chaque été un bar à mojito sur sa terrasse. « On garde l’esprit du mojito, frais, facile à boire mais à notre sauce,» précise Coralie Gajda qui officie au bar de l’hôtel. « Nous le préparons avec du rhum ambré, du rhum blanc mais aussi avec d’autres alcools : gin, vodka, liqueur. On y ajoute de la couleur en changeant le sucre par du sirop de myrtille et on garde de la fraîcheur avec des essences de jasmin ou de violette. La menthe est remplacée par du basilic, et pourquoi pas de la sauge.»
Et pour terminer notre enquête, direction les bars des palaces où le mojito n’est pas snobé. Christophe Davoine, assistant chef barman au Peninsula nous confirme que ce breuvage estival a encore de belles années devant lui : « il n’est pas sur notre carte, nous le faisons à la demande du client. Nous adaptons la recette selon les années en essayant de lui garder sa nature propre. Cet été, nous proposons un mojito à base de Havana 3 ans, de sirop de cassonade, de citron vert pilé, de bitters typé cannelle pour le côté exotique, terminé par un spray de Havana 15 ans qui note la touche de complexité. ». Un mojito 5 étoiles !
Alors ce soir pour l’apéro c’est mojito !
* Mojito Remix de Jérémy Auger en collaboration avec Olivier Reneau – Photographe Philippe Levy – Editions Hachette Vins – Prix : 12,90 €