Excellence et Rhum, deux mots qui s’associent parfaitement ensemble, et, en passionné(e)s que nous sommes, que l’on aime être la plus vraie possible ! Désormais bien connu des aficionados, ExcellenceRhum a su grandir doucement et avec le temps, a réussi à s’imposer parmi les poids lourds de la vente de rhum par correspondance. A l’occasion de la sortie de la « Collection by ExcellenceRhum » et de sa présence au bar des nouveautés du dernier Rhum Fest Paris de la fin avril, j’en profite pour – si vous ne le connaissez pas encore – vous faire découvrir une petite partie du génialissime Alexandre Beudet, fondateur d’ExcellenceRhum, et dorénavant propriétaire d’une marque d’embouteillages indépendants !
Damien Sagnier : Bonjour Alexandre. Pourrais-tu te présenter succinctement ?
Alexandre Beudet : Bonjour Damien. Tout d’abord, je suis ce que l’on pourrait appeler un vrai passionné de rhum. J’ai également l’entreprenariat dans l’âme, c’est pour cela que j’ai voulu créer ma propre entreprise dans le domaine de ce spiritueux.
Par quel produit as-tu découvert le monde du rhum ? Quel rhum t’as vraiment rendu accro ?
J’ai découvert le monde du rhum avec les rhums Neisson, Saint James et La Favorite mais également grâce à la mixologie autour de cocktails secs et opulents avec des rhums blanc haïtiens et grand arômes.
Actuellement, tu fais partie des cavistes virtuels francophones les plus connus et réputés. Quand et comment t’es venu l’idée de créer ExcellenceRhum ?
L’idée est venue lors d’un voyage en famille dans les Caraïbes, en 2013. Quelques mois plus tard, avait lieu le Rhum Fair (son nom avant de devenir le Rhum Fest), après quelques prises de contacts et quelques mois assidus de travail, ExcellenceRhum était en ligne et proposait pas loin de 450 références.
Possèdes-tu une formation en rapport avec les spiritueux ou le métier de caviste? Que faisais-tu avant de lancer ExcellenceRhum ?
Aucunement ! En fait, la formation s’est faite sur le tard, alliant passion pour cette noble boisson et l’entreprenariat. Avant ExcellenceRhum j’étais dans le secteur du BTP et plus particulièrement dans le métier de la sécurité incendie donc mis à part le risque inflammable de certain rhum il n’y a aucun rapport. 😀
Sur ton site, tu proposes plus de 1800 références à travers 400 marques et une cinquantaine d’origines différentes. Comment fais-tu pour dénicher les nouveautés ? Est-ce que tu pars en démarchage à travers le monde pour importer toi-même ou passes-tu par des importateurs et commerciaux comme la majorité des cavistes ? Est-ce que des producteurs t’ont déjà contacté pour bosser en direct avec toi sans passer par des intermédiaires ?
Une partie du catalogue d’ExcellenceRhum est constitué de produits que l’on ne trouve nul par ailleurs à part dans les pays producteurs. J’ai la chance de pouvoir partir à la recherche de ces rhums et petites distilleries. L’autre partie du catalogue est déjà importée en France, les Français étant de grands consommateurs de rhum. Un certain nombre de producteurs me contactent pour me présenter leurs gammes et me vendre leurs rhums, mais il faut que ces rhums nous plaisent avant tout.
Tu es en capacité d’envoyer partout ou presque dans le monde entier. Qui sont tes clients ? Quel(s) type(s) de rhum se vendent le plus chez toi et où envoies-tu le plus de rhum ?
Partout où l’import d’alcool est autorisé, quelque chose comme 130 pays ! Mes clients sont assez différents les uns des autres, certains sont complètement néophytes, d’autres amateurs, collectionneurs ou professionnels du secteur. Le rhum agricole est sans doute la meilleure vente et mes clients sont majoritairement français.
De combien de personnes es-tu responsable dans ton entreprise ? Il doit y avoir une sacrée équipe pour gérer toutes les commandes et promettre un envoi sous 24h…
Pas assez ! Je plaisante, nous allons dans les semaines à venir embaucher pour faire face à la demande toujours grandissante, nous avons également des travaux d’agrandissement de notre entrepôt et de notre chai.
Que penses-tu apporter de plus que les autres e-commerces francophones spécialisés dans le rhum ?
Nous avons acquis durant ces 3 années, un savoir-faire, nous avons misé sur un service irréprochable, une rapidité d’expédition et un choix inégalable. Nous apportons également des conseils personnalisés à nos clients pour parfaire leurs parcours initiatiques mais nous conseillons également les bars et restaurants sur les produits à acquérir et à proposer à leur client.
En France, le taux de pérennité d’une entreprise au bout de 5 ans est de seulement 50%. Ce qui veut dire qu’arriver à ce cap critique, un entrepreneur sur deux dépose le bilan. Tu es actuellement dans ta 4ème année d’existence et c’est généralement là où la trésorerie est en berne… Au-delà de stabiliser le modèle économique et de fidéliser les clients actuels, il faut aller en chercher d’autres et continuer de s’affirmer face à la concurrence. Sans donner de chiffres et étaler ton bilan comptable, est-ce qu’Excellence Rhum arrive à tirer son épingle du jeu ou c’est encore un peu tendu ?
ExcellenceRhum arrive à tirer son épingle du jeu bien sûr. Ce n’est pas encore l’eldorado mais qu’importe ! Quand tu vis de ta passion c’est déjà très bien de nos jours, non ?
On peut te voir régulièrement participer sur les réseaux sociaux et pas uniquement quand c’est en rapport avec ton entreprise. C’est important pour toi de séparer ton activité professionnelle et d’être un passionné parmi tant d’autres sur les groupes Facebook dédiés aux rhums ?
Oui j’aime bien interagir sur les réseaux sociaux. J’étais encore client des boutiques et cavistes il y a quelques années, j’ai toujours cet œil de consommateur et de critique sur les produits. Les réseaux sociaux permettent aussi de m’exprimer en tant que consommateur sur certains produits et de faire partager quelques notes de dégustation.
On voit souvent des cavistes (indépendants ou en chaîne) qui répètent bêtement des discours appris par cœur, bégayent presque quand le client demande un conseil pointu et qui ne connaissent pas forcément les produits qu’ils vendent. C’est ce que j’appelle moi des « vendeurs » mais absolument pas des « cavistes ». Quelle est ta définition du métier ? Qu’est-ce qui te différencie d’un caviste physique ? D’ailleurs, est-ce qu’un magasin « réel » est en projet ou comptes-tu rester en ligne seulement ?
Je ne suis pas vendeur ni caviste mais juste un passionné qui donne quelques conseils sur le choix des rhums et leurs dégustations de façon que mes clients prennent le plus grand plaisir en savourant cette eau-de-vie extraordinaire. Le vendeur vend avec sa force de vente mais sur un site e-commerce, c’est le client qui choisit son produit. En appui, mon équipe renseigne, conseille par email, téléphone ou sur le chat et même sur les réseaux sociaux. J’aimerais avoir une boutique physique, c’est un projet auquel je réfléchis sérieusement depuis pas moins d’un an.
La communication a commencée légèrement avant mais tu as profité de la 5ème édition du Rhum Fest Paris pour lancer officiellement « Collection by ExcellenceRhum », ta marque d’embouteillage indépendant. C’est un projet que tu portais à la naissance d’ExcellenceRhum ou l’idée de devenir embouteilleur indépendant t’est venue au fur et à mesure de l’aventure ?
Ca a toujours été un rêve de déguster, sélectionner des distillats que j’aime et qui me ressemblent pour ensuite les embouteiller sous ma marque. Ce jour est arrivé et j’en suis réellement fier.
Combien de temps as-tu mis pour sélectionner tes produits ? Choisir la forme de tes bouteilles ? Penser et dessiner tes étiquettes ? Bref, combien de temps s’est passé entre l’idée et sa concrétisation ?
J’ai ce projet en tête depuis plus de deux ans. Il a fallu un an de réflexion sur la direction que devait prendre cette marque et une autre année pour mettre à plat et concrétiser toutes ces idées.
J’ai personnellement eu la chance de participer à la phase de « recherche » en goûtant l’année dernière 8 rhums que tu avais potentiellement sélectionnés pour faire partie de ta gamme. 3 en ressortaient vraiment selon mes papilles. Est-ce que ce sont les mêmes rhums avec un an de vieillissement en plus ou y a-t-il eu du changement depuis ?
Il y a eu quelques changements, à savoir un autre fût tout en gardant la même provenance et l’année de distillation. Il y a également eu un an supplémentaire en terme de vieillissement, toujours sur le continent mais à Paris cette fois ! Ça a permis d’affiner le Diamond du Guyana, mieux intégrer l’alcool et faire ressortir cette finale fumée très agréable.
Pourrais-tu nous présenter ta gamme ainsi que ta philosophie (taux d’obscuration, filtrations, réduction, durée de vieillissement tropical et/ou continental, etc.) ?
Pour notre gamme Collection by ExcellenceRhum, nous avons souhaité honorer l’authenticité des rhums et le savoir-faire des distilleries. Chacune des bouteilles est étiquetée et embouteillée à la maison. Aucun sucre ou colorant n’est ajouté et il en est de même pour la filtration à froid. Il y a simplement une filtration mécanique pour éliminer les très grosses particules. La durée de vieillissement tropical et continental est indiquée sur chaque étiquette, mais également l’appareil de distillation et même la part des anges totale sur la durée de vieillissement. Chaque bouteille est également numérotée.
La Collection 2017 se compose d’un Guadeloupe Bellevue de 18 ans (251 cols), d’un Demerara Diamond de 11 ans (247 cols), d’un Jamaica Hampden de 16 ans (195 cols) et d’un Barbados Foursquare de 11 ans (210 cols). L’intégralité sera disponible à la vente le 22 mai 2017.
« Collection by ExcellenceRhum » se concentre donc pour l’instant sur les rhums de tradition anglaise. Est-ce un choix délibéré par rapport aux ventes constatées sur ExcellenceRhum ou est-ce parce qu’il n’y avait peu de tradition française et/ou espagnole disponibles chez les brokers que tu as rencontrés ? Quels sont tes goûts personnels ?
Il s’agit d’une adéquation entre mes goûts personnels et l’opportunité de sélectionner quatre magnifiques fûts. Il s’avère que tous ces rhums sont distillés dans le respect de la tradition britannique. Il y a bien sur des distillats de tradition française ou agricoles et même espagnole chez les brokers que j’ai visités, mais je n’ai pas trouvé les profils aromatiques ni la transparence d’information que je cherchais. C’est véritablement les valeurs et la philosophie de notre marque Collection by ExcellenceRhum.
Comment sélectionnes-tu tes rhums ? As-tu une idée en tête dès le départ où tu y vas au feeling et tu t’adaptes selon le catalogue qu’on te propose ? Qu’apportes-tu comme valeur ajoutée aux rhums que tu achètes ? Est-ce que l’équipe d’Excellence Rhum t’aide ou c’est vraiment une entité indépendante du site web?
J’ai quelques idées en tête mais il suffit que je tombe sur LE distillat pour avoir un véritable coup de cœur et mes plans se chamboulent. Quand je goûte une pépite, j’ai comme l’impression d’avoir fait une trouvaille et j’ai de suite envie de la partager à son plus juste prix. Pour la Collection 2018 j’ai tellement d’idées, il va falloir trancher ! L’équipe m’aide bien sûr, j’ai le privilège d’écouter les personnes qui travaillent avec moi, qui m’assistent tout au long de l’année. La marque Collection fait partie intégrante d’ExcellenceRhum.
Je reviens un peu sur le Rhum Fest avant de parler de l’avenir… Tu as donc présenté ta gamme aux Awards et le Hampden est ressorti double médaillé (Palmarès 2017 disponible ici). Tu étais également présent durant les 3 jours pour présenter et faire goûter ta gamme. Comment as-tu été reçu en tant qu’IB (de l’anglais « Independant Bottler ») ? Quels sont les premiers retours que tu as eus des consommateurs ce week-end ? Es-tu satisfait ou au contraire déçu de ne récolter que 2 médailles aux Awards 2017 ?
Les retours de dégustation sont très bons sur l’ensemble des festivaliers. La bonne surprise était de recueillir des avis favorables de la part des néophytes adeptes des rhums doux et léger. Ils se sont prêtés au jeu de la route des arômes sur notre stand. Sur le Bar des nouveautés, nous avions des rhums de mélasse sucrés, non sucrés, des rhums agricoles et la gamme Collection, en bref, des rhums de tous horizons. Collection propose cette année des rhums puissants (bruts de fût) et très aromatiques dont l’alcool est bien intégré, cela a permis d’être apprécié par le plus grand nombre.
Concernant les récompenses, je suis très content d’avoir obtenu 2 médailles, c’est très encourageant pour le lancement de ma marque.
Comptes-tu rester dans le rhum à proprement parler pour embouteiller ou tu n’es pas hostile à te tourner vers d’autres alcools de canne comme le clairin1, la cachaça2, le cocoroco3, l’arrack4 ou encore le grogue5 ?
Pourquoi pas. Je ne suis pas contre embouteiller d’autres distillats, du moment que ce soit bien fait et que ce soit très bon à déguster.
Est-ce que des blancs sont prévus dans les prochains bottlings ou tu ne veux proposer que des vieux ? Et en vieux, vas-tu te lancer dans l’assemblage et/ou le vieillissement personnel à l’instar de Velier, Plantation ou Compagnie des Indes par exemple ? Ou penses-tu rester dans le mode sélection/embouteillage comme Kill Devil?
Des rhums blancs uniques sont prévus. J’ai également quelques essais de vieillissement en cours, ça reste très traditionnel. Pour cette première Collection, je me suis mis sur un créneau de sélection/embouteillage mais je pourrais également affiner ou faire vieillir des fûts en attendant le résultat qualitatif escompté pour les prochaines Collection.
Est-ce qu’il y aura exclusivité à ExcellenceRhum ou bien tu sépares vraiment les deux entités et ta marque « Collection by ExcellenceRhum » pourra se retrouver sur les étagères d’autres cavistes ?
Non aucune exclusivité. J’aime les cavistes et les boutiques spécialisés physiques je n’y vois aucun inconvénient.
Etant professionnel, tu es au cœur du système et tu as vu le rhum prendre de plus en plus d’ampleur au fil des années. Est-ce que ta vision de consommateur est différente de celle de caviste et de celle désormais d’IB ou les 3 casquettes sont-elles liées ? Comment perçois-tu le présent et l’avenir du rhum ?
C’est surtout la vision qu’on a du rhum qui a évolué. Le rhum lui, a toujours existé, les produits se sont adaptés aux consommateurs. Autrefois, on voyait le rhum comme un alcool à mélanger et uniquement cela. Dorénavant le rhum s’est frayé une place entre les spiritueux nobles qui s’élèvent au fil du temps et cohabitent avec les tanins du bois. On redécouvre le rhum blanc comme un diamant brut à travers lequel on pourrait juger de la qualité de la mine. Le futur du rhum c’est davantage de micro distilleries à travers le monde, des distillats très qualitatifs, une transparence d’information ou une législation accrue.
Merci pour ta disponibilité, gentillesse et professionnalisme Alexandre. Est-ce que tu aurais un dernier mot avant de terminer cet entretien ?
Merci à toi, merci à Rumporter d’exister et vive le rhum !
1 clairin : rhum artisanal, spécialité d’Haïti.
2 cachaça : rhum artisanal ou industriel, typique du Brésil, le plus souvent agricole
3 cocoroco : sorte de vodka à base de jus de canne à sucre très répandue en Bolivie
4 arrack : alcool à base de canne à sucre mais parfois aussi de céréales, de fruits ou de sève originaire d’Asie du Sud/Sud-Est.
5 grogue : rhum agricole du Cap Vert avec malheureusement plus d’alcool mauvais voire frelaté que de qualité