Interview réalisée le 08/04/2020
Rumporter : Pouvez-vous nous faire un point à date de l’évolution de la maladie à la Barbade. Pouvez-vous nous raconter concrètement comment vous vous êtes organisés sur le site de production. Quels métiers sont en télétravail, au chômage partiel ou nécessitent une présence physique ?
Raphael Grisoni : Covid 19 n’est pas timide du tout à la Barbade avec 60 cas et 3 morts pour une île de 280 000 personnes (au 8 Avril 2020).
Nous avons anticipé en prenant des mesures de protection du staff très tôt dans cette crise sanitaire. Pour ne pas risquer la santé de nos employés, nous avons mis en place une procédure sanitaire impliquant notamment du gel hydroalcoolique que nous avons distribué. Ainsi, nous avons fermé notre centre de visite le 23 mars ainsi que notre centre de distribution le 24 mars. Nous avons arrêté toutes nos opérations le 27 mars (embouteillage, distillerie) une semaine avant le lockdown officiel. Les employés travaillant sur l’outil informatique (finance, service client, marketing, RH et moi-même) opérons en télétravail et cela fonctionne bien avec des visioconférences quotidiennes et d’autres hebdomadaires.
R : Un peu partout dans le monde, les distilleries se mobilisent pour produire de l’alcool destiné à la fabrication de gel avec le soutien des autorités de régulation (douanes, fraudes), est-ce qu’un effort similaire est mis en place à la Barbade ?
RG : Je n’ai pas de visibilité sur ce que font les autres distilleries car il n’y a pas d’action concertée mais quelqu’un que tu connais très bien fait des vidéos tous les jours pour parler de l’alcool qu’il fait pour les hôpitaux (normal il a un contrat et il vend ce type d’alcool toute l’année). Pour nous, qui n’avons pas de colonne qui produise de l’alcool neutre, nous avons dû modifier l’outil. Nous avons fait un premier batch de 2 000 bouteilles de hand sanitiser avec la formule de l’OMS que nous avons donné au Barbados Health Supply (départment gouvernemental qui gère le supply des hôpitaux et des pharmacies).
Nous ne pouvons plus trouver les autres ingrédients nécessaires à la fabrication autre que l’alcool bien sur donc notre prochaine production (le 15 avril quand le confinement total sera levé) sera des gels hydroalcolliques avec de l’alcool à 80% et un dénaturant. La production prévue est de 28 500 bouteilles de 175 cl nous donnerons au personnel soignant des hôpitaux et centres médicaux. Cela représente une aide de 500 000 dollars barbadien. C’est dans l’ADN de la distillerie et de notre marque de soutenir notre communauté directe et indirecte.
R : Comment cela se passe-t-il concrètement ? S’agit-il d’un achat de la part de l’état ? Qui fixe le prix ? A qui devez-vous concrètement livrer cet alcool ?
RG : Tout alcool hand sanitiser pour la Barbade est et sera donné gratuitement. C’est notre soutien à notre communauté.
R : Savez-vous quelles conséquences, la crise impliquera sur votre propre production de rhum ?
RG : Cette pandémie aura sûrement un impact sur la demande, impact qu’il est aujourd’hui bien difficile d’évaluer avec la fermeture mondiale du CHR et la réouverture dans des conditions qui ne sont pas connues. Dès que nous réouvrirons, nous distillerons selon notre planning initial car ce que nous produisons aujourd’hui ne sera utilisé dans nos blends que dans 5, 8, 12, 17 ou 20 ans… En revanche, nous verrons dans quelques mois l’impact de la pandémie sur notre activité d’embouteillage.
R : Avez-vous déjà perçu un impact de la crise sur les ventes ?
RG : Certainement. Ici à la Barbade, il est interdit de vendre de l’alcool depuis la semaine dernière et de toute façon les supermarchés, bars et restaurants sont fermés. Donc nous avons un impact direct sur nos ventes locales, ce qui est inévitable en ces périodes. Pour le reste du monde nous sommes à la même enseigne que nos concurrents/camarades. Mais je vais dire que cela passe au second plan car ce qui est important c’est que l’impact en vies humaines soit le plus bas possible.
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