La bien connue boutique Parisienne sur l’art de vivre aux Caraïbes, Christian de Montaguère est bien plus qu’un simple concept store Caribéen (lire ici et ici pour plus de détails) puisque c’est aussi l’un des premiers cavistes en France à s’être spécialisé dans le rhum ! A l’aube des 10 ans de la boutique, nous avons profité pour faire un point avec lui.
Damien Sagnier : Bonjour Christian. Bon nombre de lectrices et lecteurs de Rumporter te connaissent déjà en tant que caviste et épicier, mais peu savent comment tu en es arrivé là. L’histoire commence quand tu étais Président de l’Union des Commerçants de la ville de Base-Terre en Guadeloupe il me semble, c’est ça ?
Christian de Montaguère : Pas tout à fait. L’histoire ne commence pas en Guadeloupe, mais de cette façon : Avant d’ouvrir cette boutique, j’ai travaillé presque 7 ans chez Giorgio Armani Paris. J’étais en contact permanent avec du monde qui voyageait beaucoup et notamment qui se rendaient aux Caraïbes, ce que je repérais relativement vite, lorsqu’ils en revenaient tout juste (aaaah, pas illogique que je le puisse !). Et cela permettait souvent que l’on converse là-dessus. De ces conversations j’ai fait le constat qu’il n’y avait pas de lieu dans Paris où l’on pouvait trouver un ensemble de produits des Caraïbes, dans un cadre transmettant en même temps l’âme de ces contrées… J’ai donc décidé de créer ce lieu et voilà où j’en suis !
DS : Depuis Septembre 2008 donc, tu es établi rive Gauche, au 20 de la rue l’Abbé Grégoire dans le 6ème arrondissement de Paris. En étant le pop-up store du Rhum Fest Paris depuis la 1ère édition en 2011 et avec la création de la Confrérie du Rhum en 2013, CDM est rapidement devenue la boutique emblématique du rhum à Paris d’abord, puis en France ensuite. Comment ta boutique a-t-elle évolué et quel est ta vision concernant l’engouement pour ce spiritueux après ces 10 ans derrière le comptoir ?
CDM : J’ai mis le rhum dans mon offre, ce qui de toute évidence, ne pouvait être autrement, celui-ci étant le produit phare de la Caraïbe. J’ai démarré avec un peu moins de 200 rhums, mais très vite les choses se sont accélérées quant au rhum, et j’ai été amené à élargir cette offre en permanence. Tu évoques l’engouement pour ce spiritueux, et en effet, le terme est le bon car cela se sent, se voit, partout où le rhum est présent : boutiques physique ou en ligne, réseaux sociaux, événements tel que le Rhum Fest… La progression est permanente, les marques fusent de partout, ainsi que les amateurs. C’est assez incroyable !
DS : D’ailleurs… En parlant de cette adresse, c’est le destin ou le hasard ? (L’abbé Grégoire était une figure emblématique de la Révolution française, anti-esclavagiste, co-fondateur de la Société des amis des Noirs en 1788, orateur au Club des Jacobins dès 1791, fondateur du Conservatoire National des Arts et Métiers en 1794 et auteur de multiples mémoires et textes en rapport avec la traite négrière jusqu’en 1826)
CDM : Tu n’es pas le seul à avoir remarqué que le nom de la rue de notre boutique était celui de l’Abbé Grégoire, cependant, si d’autres m’en avaient parlé, tu es un de ceux, ou je dirais plutôt celui, qui m’en a dit le plus sur lui, et je t’en félicite ! Je n’ai pas choisi cette adresse volontairement, c’est vraiment le hasard. Ma maigre contribution aura alors été de l’avoir rapproché à nouveau des Caraïbes, à Paris et par ton interview de le faire connaitre ou mieux connaitre aux lecteurs de Rumporter…
Le rhum, c’est plus qu’un spiritueux, c’est aussi une histoire dense et tumultueuse, celle d’hommes et de femmes venus de différentes parties du monde, donnant ainsi naissance à des pays nombreux et variés, attachants, pour la plupart.
DS : Artistes de la scène musicale, humoristes et comédiens, écrivains et photographes, rhumiers et bartenders, chefs cuisiniers et pâtissiers ou bien encore politiques et sportifs, on a l’impression que ta boutique est un passage obligé pour beaucoup de célébrités, qu’ils soient d’origine Caribéenne ou non. Quel est ton meilleur et/ou ton pire souvenir avec ces stars ?
CDM : En effet, dès les premiers jours de l’ouverture de la boutique, j’ai vu défiler bien des personnalités, dont certaines que je ne nommerai pas, pressentant qu’ils préféreraient la discrétion… Ceci dit ce n’est pas un passage obligé, mais presque ! (sourire)
Les Caraïbes ne laissent jamais personne indifférent. Mon pire souvenir est, même s’il y a pire dans la vie, la fois où une personnalité du cinéma, bien connue, n’a pas voulu que l’on prenne une photo avec elle et a mis de la distance. Mais je suppose bien que ces personnes ont souvent besoin qu’on les laisse un peu tranquilles alors… Nous avons donc dû nous contenter d’avoir eu sa présence, ce qui était déjà pas mal.
Sinon, mon, mais je préfère dire, « mes » meilleurs souvenirs : ce sont les personnalités qui se prêtent au jeu, et ils sont nombreux. Cela met toujours une bonne ambiance sur le moment avec les clients présents !
DS : Cave à rhums, épiceries fines, bien-être, cosmétique, culture ou bien art et décoration, tu multiplies les références dans divers domaines dont pas mal de produits achetés en direct aux producteurs ou artisans, et souvent en exclusivité sur le sol métropolitain. Comment fais-tu pour dénicher autant de trésors partout dans les Outre-Mer tout en faisant tourner magasin et site e-commerce ?
CDM : Oui, mes produits viennent de différents endroits, ce qui ne me rend pas la tâche toujours facile, mais sans pour autant faire du commerce équitable, je prends plaisir à proposer les produits de petits artisans qui travaillent bien, qui ne produisent qu’en petites quantités. Quelque part cela a du sens pour moi. Au début j’ai beaucoup chiné pour trouver les produits, maintenant ils viennent à moi, mais je suis obligé de faire des choix, tenant compte de mes contraintes.
Et bien sûr, les exclusivités que j’ai, sont « un plus » que je partage avec mes clients qui sont contents de pouvoir en bénéficier. Repartir avec son petit rayon de soleil que l’on ne trouvera que chez nous, c’est très apprécié.
DS : Depuis quelques mois, nous pouvons te voir régulièrement en visite dans différents chais de la Martinique et de la Guadeloupe. On se souvient que l’année dernière déjà, tu avais sélectionné un Réunionnais de 15 ans en Porto finish chez Plantation. On peut alors naturellement penser que tu nous prépare des embouteillages spéciaux afin de marquer le coup ! Certains ont déjà pu gouter quelques échantillons lors du dernier Rhum Fest Paris il me semble… Tu peux nous en dire plus sur tes cuvées ?
CDM : Oui, des cuvées sont effectivement en préparation, mais je n’en dirai qu’un petit peu pour l’instant. Sont prévues 4 cuvées pour célébrer l’événement, nos 10 ans. Je ne les liste pas dans l’ordre de sortie, mais par ordre alphabétique. Il faut bien laisser un peu de suspens… Un rhum vieux brut de fût de chez Bologne, un rhum blanc agricole de conception inédite de chez La Favorite, un rhum vieux brut de fût de chez Karukera et un punch aux fruits de chez Les rhums de Ced. Elles seront toutes originales, en édition limitée et dignes de bons rhums, de très bons rhums.
DS : Comment as-tu choisis cette sélection et pourquoi ces marques en particuliers ?
CDM : Bien évidemment, j’ai dû faire des choix mais ce n’est que partie remise pour certaines marques ! Mes choix se sont orientés en laissant parler mon cœur, pour la circonstance… Bologne, parce que j’ai fait toute mon enfance à moins d’1 km du domaine. Par générations interposées, je connais du monde, de la Direction au planteur de cannes. Ça parle tout seul et en dit assez, n’est-ce pas ?
La Favorite, parce que c’est mon coup de cœur de l’île sœur. Le rhum que j’ai retenu est issu d’une petite parcelle exceptionnelle.
Pour Karukera, c’est tout simplement parce que cette distillerie porte le nom Caraïbe qu’avait la Guadeloupe, mon ile natale, à l’arrivée de Christophe Colomb. J’ai des origines amérindiennes très proches, du côté paternel, donc ce n’est pas anodin… Atypique mais très sympathique.
Et enfin, un punch avec un duo de fruits inédit par Ced. Là, j’ai cherché à faire l’alliance de souvenirs d’enfance et d’adolescence passée en Guadeloupe… Ce punch sera élaboré avec des fruits qui me rappellent chacun des moments vécus là-bas et j’ai hâte de le présenter !
DS : Que de mise en bouche… Ça promet ! Pour revenir à la boutique, les masterclass et ateliers s’enchainent, les dégustations et découvertes aussi, un catalogue de références sans cesse en mouvement, des partenariats avec divers chefs de la Gastronomie Antillaise, une présence au SAGASDOM, une e-boutique, collaborations pour des livres, et maintenant des embouteillages… Que vas-tu nous préparer d’autres pour la semaine des 10 ans ?
CDM : Petite ou grande (sourire), mais il y a une surprise de prévue pour les moments forts autour de la date de l’anniversaire, mais là, silence : je ne dévoile pas le secret ! Cependant, les festivités ont déjà commencé, car nous venons de lancer un jeu-concours sur Facebook et Instagram, avec 1 billet d’avion à gagner pour 2, pour un voyage aux Caraïbes avec la bien connue compagnie aérienne qui nous ressemble, Air Caraïbes, à partir de Paris (destinations au choix : Guadeloupe, Martinique ou Cuba).
DS : Sinon, pour conclure… A part l’anniversaire, as-tu déjà des idées/projets en exclu pour le futur de la boutique ?
CDM : Ce que je peux dire déjà, c’est qu’une série de cuvées est en cours de réflexion, mais je pense que tu comprendras que ma courte réponse s’arrêtera là, et que tu ne m’en voudras pas. (sourire)
CHRISTIAN DE MONTAGUÈRE
20 Rue de l’Abbé Grégoire, 75006 Paris