Hidden loot, le butin du Panama se cache en Charentes

La famille Naud sait tout faire ou presque : cognacs, vodkas, gins et… rhums. Ces distillateurs et assembleurs, maîtrisent aussi bien les arcanes des alambics charentais que de la colonne à distiller. Mais quand il s’est agi de créer leur propre marque de rhums, ils sont allés chercher des jus fabriqués au Panama à partir d’un mélange de mélasse et de jus de canne.

Le résultat ? Une gamme de rhums de dégustation (notamment le Ron Naud 15 ans d’âge) et deux rhums épicés dans la gamme Hidden loot : L’original et le Dark Reserve. Rencontre avec Pierre Naud qui représente la 5e génération de la lignée.

Hidden loot
Fabien Humbert : Racontez-vous comment est née l’aventure des rhums Hidden Loot

Pierre Naud : C’est une longue histoire puisque je représente la cinquième génération de distillateurs dans la famille. Mon arrière-arrière grand-père du côté de ma mère s’appelait Emile Perrier et était un liquoriste réputé au début du 20e siècle. Son produit phare était la Sève Perrier, une liqueur à base de cognac et de plantes.

Son fils a continué l’aventure mais il a délocalisé la distillerie de quelques kilomètres dans l’ancien moulin à grain de Pinthiers. Puis à l’époque de mon grand-père, dans les années 1950, les liqueurs sont peu à peu passées de mode et la distillerie familiale s’est tournée vers la production de cognac.

FH : C’est la naissance du cognac Naud ?

PN : N’allons pas trop vite, mon grand-père était bouilleur de profession, c’est-à-dire qu’il achetait des vins, qu’il les distillait puis les faisait vieillir. Mais ensuite il ne les mettait pas en bouteilles, il vendait ses cognacs en vrac aux grandes maisons.

Plus tard, la distillerie s’est diversifiée en produisant des alcools neutres comme la vodka et le gin, toujours pour le compte d’autres marques. C’est d’ailleurs pour nous une fierté de maîtriser à la fois la distillation en alambics charentais traditionnels, et en colonne de distillation.

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C’est finalement il y a six ans que nous avons décidé de mettre en bouteille et de commercialiser nos propres cognacs sous la marque Naud. Nous avons défini notre propre style, alors qu’auparavant on élaborait des produits pour les autres, avec leurs exigences, leur cahier des charges.

Nous avons aussi mis au point une bouteille atypique commune à tous nos spiritueux, qui symbolise à la fois les alambics charentais et la colonne à distiller-rectifier.

FH : Et comment en êtes-vous venus à commercialiser des rhums du Panama ?

PN : D’abord, on a retrouvé dans les archives de la distillerie qu’Emile Perrier avait déjà dans sa cave des rhums, des grogues… et donc que cela faisait partie de notre histoire. Ensuite c’est une rencontre avec un producteur de rhum du Panama qui était venu en Charentes rendre visite au chaudronnier avec lequel nous travaillons : Chalvignac, à Jarnac-Champagne.

Il voulait voir des alambics Charentais qui tournaient. Comme nous distillons toute l’année, il est venu chez nous. Quelques années plus tard, lorsqu’on a décidé de produire du rhum, on est retourné le voir au Panama, et on a choisi les qualités qui nous intéressaient.

Nous avons décidé de sortir un rhum de quinze ans d’âge et un rhum épicé pour commencer. Notre Ron Naud 15 ans a été élaboré à partir d’un mélange de mélasse (en majorité) et de jus de canne fermentés puis distillés.

Il vieillit quinze ans au Panama en ex-fûts de Bourbon, puis il passe entre 6 et 8 mois sous bois dans nos chais en Charentes pour une double maturation.

FH : Quel est l’intérêt de cette période de maturation en Charentes ?

PN : Nous apportons au rhum une réduction lente, en trois temps, traditionnelle à Cognac. Elle se fait dans des chais avec un sol de calcaire battu où règne 90% d’humidité. Nous trouvons que cela apporte de la rondeur à ce rhum qui est un peu sec en arrivant du Panama.

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FH : Et le rhum épicé Hidden Loot ?

PN : Il s’agit de la même matière première mais qui a vieilli 2 ans au Panama avant d’être importée en vrac en France. Pour Hidden Loot nous ne pratiquons pas la maturation charentaise. Nous ne voyons pas l’intérêt de bonifier un rhum qui va un peu s’effacer derrière des arômes et du sucre.

Nous avons créé deux cuvées. D’abord le Hidden loot original, puis le Dark Reserve. Pour l’original, dès le départ nous voulions de la complexité. On avait l’impression que dans les autres spiced, on sentait le rhum blanc d’un côté et un arôme dominant de l’autre.

Chez nous il y a 7 arômes distincts : des notes de banane, de noix de coco, d’orange, de vanille, avec des soupçons de cannelle, de cacao… Cela donne un rhum très opulent.

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FH : Quelle est la différence entre l’original et le Dark Reserve ?

PN : Le Dark Reserve est né d’une demande de nos distributeurs, qui après le bon démarrage de l’Original, demandaient un spiced encore plus premium. On s’est inspiré des notes d’orange confite/amère qu’on retrouve dans certains cognacs pour le réaliser. C’est la même base que l’Original.

Mais ici on a travaillé l’orange de Séville, bigarade, pour obtenir le côté amer qu’on retrouve par exemple dans le Grand Marnier. On a aussi travaillé la fève de tonka, qui tire entre l’amande amère et la vanille, et donne en petite touche pâtissière. Sans oublier le piment oiseau apporte un côté funky, une finale chaude en fin de bouche.

Côté dégustation, l’Original qui a une certaine puissance aromatique va bien avec des cocktails, avec un peu de ginger beer par exemple. Tandis que le Dark Reserve est plutôt consommé pur.

FH : Dernières questions, où trouve-t-on vos rhums ? Et qu’est-ce que vous nous concoctez pour cette année ?


PN : Nos produits sont distribués par les cavistes, même si l’Original vient de rentrer en GMS (grande distribution nlrd). Quant à l’avenir… Notre démarche reste modeste, et consiste à aller chercher les pépites. Nous venons de signer avec un producteur de rhum d’Amérique Latine et nous devrions sortir un nouveau rhum de dégustation…