Le système de fermage qui ne fut réformé qu’à la marge, expire lentement en même temps que le système esclavagiste qui connaît une crise démographique. En 1843, le pouvoir colonial décide de limiter le nombre d’alambics à six dans la Colonie. Le montant annuel à payer pour posséder un alambic est de 50 000fr.
Il s’agit de combiner l’intérêt fiscal – 300 000fr par an – et l’intérêt sanitaire via un contrôle de la production et de la distribution. C’est dans ce contexte de contrôle absolu que naît la distillerie Isautier.
L’industrie du rhum connaît quelques secousses au moment de l’abolition de l’esclavage le 20 décembre 1848. Mais si on note un affaissement de la production en 1848, il n’est pas évident d’attribuer cette baisse directement à l’abolition malgré la désorganisation relative que cela a produit. En effet sur la période 1830-1850, on observe des fluctuations de la production tantôt à la hausse, tantôt à la baisse.
Cette réorganisation économique donne un coup mortel au système régissant la fabrication de rhum. En 1850, les six alambics sont remis sur le marché des adjudications, pour 50 000fr par an. Mais cette année-là, aucun alambic n’est attribué.
Suite à cet échec, la production de rhum devient libre en 1852, moyennant un droit de 1000 francs par alambic et par an. De plus chaque litre qui sort de la distillerie est taxé à hauteur de 75 centimes.
La libéralisation de la fabrication du rhum à la Réunion est synonyme d’augmentation de la production. Elle passe de 10 230 hl en 1852 à 16 170hl en 1854.
Cette année-là, la France s’engage dans la guerre de Crimée. Afin d’alimenter les soldats, Napoléon IIIabolit les droits de douane sur le rhum à l’entrée en métropole. Les réunionnais augmentent les capacités de stockage du rhum dans les entrepôts de douane, en vue d’accroitre les exportations.
Mais La Réunion souffre d’un retard qualitatif sur ses concurrents de la Caraïbe. A l’exposition universelle de 1855 à Paris, les rhums martiniquais et guadeloupéens se partagent les médailles d’or et d’argent, les rhums réunionnais ne récoltent principalement que des mentions honorables, au mieux des médailles de bronze.
Au cours de la dernière année pleine de la Guerre de Crimée, en 1857, la Réunion produit environ 28 100hl de rhum et en exporte 3 200hl. Les exportations chutent les années suivantes mais pas la production. La consommation locale absorbe alors de grandes quantités de rhum. Le risque sanitaire est grand dans l’île.
A suivre.
Remerciements :
M. Xavier Le Terrier, Docteur en Histoire Contemporaine (La Réunion)
Le Musée la « Saga du Rhum » (La Réunion)
Le groupe Isautier