Née sur une île façonnée par la canne à sucre et la lave volcanique, la marque Major Philippe incarne une nouvelle identité pour le rhum mauricien. Derrière cette aventure, Omnicane Ltd. met en avant un siècle de savoir-faire et une vision durable, avec l’ambition de mieux faire connaître l’île sur la carte internationale des grands rhums.
Un Ti-punch sur la plage ensoleillée ou au moment décontracté de l’afterwork : un verre de rhum, quelques gouttes de citron vert, une pointe de sucre.
Ce cocktail simple et emblématique résume à lui seul l’art de vivre mauricien, où se rencontrent naturellement ces trois ingrédients, avec au centre la canne à sucre.
Lorsque nous nous tenons au pied de la « montagne de sucre » d’Omnicane, nous ne doutons pas un instant du destin rhumier de cette terre. Omnicane, acteur majeur de l’agro-industrie mauricienne, possède des réserves qui dépassent de loin la consommation annuelle de l’île.
Pourtant, à la différence d’autres régions du monde où la mélasse a donné naissance spontanément au rhum, l’histoire mauricienne a longtemps suivi un autre scénario.
De la canne au rhum : scénario mauricien
Située à l’est de Madagascar, l’île bénéficiait d’un accord sur le sucre qui en garantissait le prix. Le rhum, même de mélasse, est longtemps resté marginal. Sous domination britannique, une loi du début du XXe siècle interdisait aux Mauriciens de distiller en dessous de 93 %.
Au début des années 2000, les réformes structurelles du secteur sucrier ont encouragé les investissements et amorcé la diversification de la chaîne sucre – bioéthanol. Plutôt que de s’en tenir à l’alcool neutre, la filière a progressivement glissé vers des spiritueux de caractère, incluant du rhum à plus forte valeur ajoutée.
Avec la libéralisation des prix du sucre en 2006, la canne, désormais moins rentable pour le seul sucre, s’est vue offrir un nouvel horizon : des rhums capables de séduire les palais européens, notamment les rhums de pur jus de canne, aujourd’hui en plein essor.
Parmi les distilleries déjà installées, comme Gray’s (1931) qui vient de lancer le plus vieux rhum de l’île, le pionnier Saint-Aubin (2003), Labourdonnais (2006), ou encore Chamarel (2008) qui met l’accent sur le terroir, tout couvre l’ensemble du spectre des cuvées à vieillir, le paysage mauricien est en pleine effervescence. Dans ce contexte, comment Major Philippe choisit-il de hisser les voiles pour sa propre aventure ?
L’aventure de Major Philippe
La marque rend hommage à un ancêtre courageux : Philippe Guimbeau, qui servit durant la Seconde Guerre mondiale et gravit jusqu’au grade de major. Selon Jacques M. d’Unienville, CEO d’Omnicane, il était un agriculteur passionné qui aimait « l’aventure palpitante ».

Cette nouvelle odyssée est aujourd’hui guidée par deux pilotes chevronnés : Alexander Oxenham, consultant formé en œnologie en Bourgogne, et Laurent Servoise, spécialiste des rhums de pur jus. Leur objectif commun est clair : « créer des rhums capables de raconter le terroir de l’île — sa canne, son climat — tout en développant un savoir- faire unique qui place le rhum mauricien au niveau des meilleurs du monde.»
«Notre idée n’était pas de copier des styles existants, mais d’ inventer une signature reconnaissable, élégante, fidèle à l’essence du rhum mauricien », assure Laurent. Dans les effluves de canne, l’expansion internationale de Major Philippe commence par une matière première locale* : la canne cultivée dans des sols volcaniques, riche en sucre et en arômes, et transformée grâce au système en boucle fermée d’Omnicane.
Les résidus de canne alimentent la distillation, 25 tonnes de CO2 sont captées et valorisées chaque jour, et les coproduits retournent aux champs comme engrais. La fermentation, enveloppée de brumes aromatiques, repose sur des levures sélectionnées qui soulignent la fraîcheur et le fruité du jus de canne.
Elle dure environ 36 heures, ajustée pour trouver le juste équilibre entre intensité et finesse. La production reste calibrée pour préserver la qualité. « Nous avons apporté des modifications à notre colonne, en ajoutant des points d’extraction à différents niveaux, explique Jean-Pierre Rouillard, Directeur Général de distillation.
Cela permet de sélectionner, par exemple, une fraction mélasse à 80 % et un pur jus à 77 % exacte issu du quatrième plateau. » Alexander ajoute, « Contrairement à la plupart des rhums de pur jus puissants voire agressif, Major Philippe se veut souple et frais. Je voulais que, dès la première gorgée, on ressente son équilibre, son élégance, sa finesse. » C’est l’esprit de la première cuvée, Britannia — du nom d’un ancien domaine sucrier, un rhum agricole où la pureté du jus de canne se marie aux notes vives d’agrumes.
Un rhum presque irrésistible à déguster sec ou en ti-punch, sur une terrasse balayée par la brise mauricienne. Vient ensuite Mon Trésor, élevé huit mois dans 84 fûts de 350 L fûts ex-cognac, avec bientôt 84 fûts de chêne français neufs en cours de remplissage.
Cette cuvée, comme l’indique son nom emprunté à une baie tranquille du sud de l’île, garde la fraîcheur d’agrumes de la marque, enrichie de touches de cannelle, de fleurs et d’une rondeur complexe.
Enfin, le spiced rum Îlot Brocus reflète «un siècle d’expertise mauricienne». Élaboré à partir de 95 % de light rum, complété par un peu de pur jus et de mélasse, il déploie des notes de pamplemousse, fruit de la passion, agrumes et épices douces, avec une touche de tabac blond.
Puissant, mais élégant, doux et accessible, c’est un spiced rum qui séduira même ceux qui n’en raffolent pas d’ordinaire, et qui se révèle idéal en mixologie. «Cette gamme n’est que la première étape d’un plus long voyage», confie Laurent, évoquant même un rhum de mélasse expérimental vieilli deux ans en petits fûts pour démontrer son potentiel. De futures éditions limitées, des vieillissements innovants et une gamme élargie sont déjà en ligne de mire. « L’ idée est simple : montrer qu’un rhum mauricien peut être à la fois accessible et ambitieux, profondément enraciné et résolument tourné vers l’avenir. »
Rhum premium : un terroir de Maurice en devenir
Bertrand Thevenau, CEO d’Omnicane – Retail Brands and Property, résume, « C’est à la fois 100 % la confiance dans le savoir- faire séculaire d’Omnicane et 100 % l’ambition de positionner Major Philippe sur le marché international du rhum premium. Nous avons bâti cette aventure sur notre expérience d’ industriel de l’ énergie, du sucre et de l’éthanol, et désormais de fournisseur de rhum, pour franchir une étape supplémentaire avec une marque premium. Nous continuerons à avancer humblement, en participant aussi à la réflexion sur le terroir du rhum mauricien. »

Car, comme on a parlé au début, l’histoire du rhum d’île de Maurice n’a guère plus de vingt ans. «Mais l’expression du terroir passe par l’ influence unique des sols volcaniques sur les variétés locales de canne», précise-t-il. Pour l’instant, la définition exacte de ce que serait une identité gustative propre au rhum mauricien — voire une indication géographique — reste ouverte. Aux amateurs du monde entier d’explorer et de révéler cette singularité. Major Philippe en offre désormais une option de plus.
* Variétés de canne à sucre utilisées : R 579, R 573, R 575, M1400/86 ET M 1176/77


