Lorena Vasquez : rencontre avec une femme qui a façonné le paysage du rhum Guatémaltèque

Le 21 juin dernier, Lorena Vasquez Master Blender de la maison Zacapa était à Paris pour présenter sa dernière création « El Alma. »

Lorena Vasquez Zacapa

Arrivée à la fin des années 80 au sein de la rhumerie Zacapa, Lorena Vasquez est parvenue à s’imposer avec brio dans le cercle fermé des Master Blender de renom. Au cours des quatre dernières décennies, elle a installé sa notoriété grâce à deux décisions importantes.

La première : démarrer un système de « solera dinámica », chose qui n’existait pas à l’époque. La seconde : élever les rhums en altitude (2300 mètres) pour apporter plus de fraîcheur et de délicatesse et limiter la part des anges.

Après deux ans de déplacements limités, ou avortés pour cause de pandémie, la présence de Lorena Wasquez dans la capitale sonne comme un événement majeur. Telle une pop star en pleine tournée pour promouvoir son nouveau disque, elle parcourt l’Europe pour présenter sa nouvelle création « El Alma » (L’âme en espagnol). Ce nouveau nectar vient compléter une collection débutée un an plus tôt intitulée « Heavenly cask » (le fût du paradis ndlr).

Léo Dezeustre : Pourriez-vous expliquer ce que recouvre la notion de « solera » chez Zacapa  ?

Lorena Vasquez : Contrairement au système de solera traditionnel andalou où les fûts restent les mêmes, chez Zacapa, nous fonctionnons différemment. Nous l’avons rebaptisé sistema solera dinàmica (solera dynamique), parce que nous faisons le choix de changer les barriques dans lesquelles nous élevons nos rhums.

Au départ, tous nos élevages passent dans des fûts de whiskies américains. Trois années s’écoulent, et un premier soutirage intervient pour incorporer des rhums plus vieux. Ces rhums dits « vieux » ont déjà vu passer quatre types de fûts différents.

Ensuite, l’assemblage de rhums en fûts américains est transvasé dans des barriques dites « brûlées ». L’opération se répète ainsi de suite avec les fûts de sherry ex-olorosso et pedro ximénez.

LD : Comment avez-vous choisi les fûts qui interviennent dans la solera ?

LV : Quand je suis arrivée au sein de Zacapa, il y a plus de trente-cinq ans, j’ai fait la découverte d’un certains nombre de barriques de Pedro ximénez et de Sherry. Une des familles propriétaires de Zacapa est d’origine espagnole.

Quand l’approvisionnement en fût américain était délicat, elle passait une commande dans le sud de l’Andalousie et nous recevions les barriques. Avec toutes ces nuances aromatiques qui se présentaient devant moi, j’ai commencé à faire mon propre puzzle et à les incorporer dans l’assemblage et le vieillissement des rhums.

LD : Comment est né ce nouveau Rhum, El Alma ?

LV : En 2020, nous avons lancé la collection « Les fûts qui viennent du paradis ». Celle-ci rendait hommage au parcours du rhum à travers les différents fûts utilisés. 4 rhums composent cette collection.

Le premier : « Zacapa la doma » un assemblage de rhums de 6 à 24 ans d’âge vieillis dans des ex-fûts de bourbon a été un franc succès. Avec « El alma », nous souhaitons poursuivre la mise en avant de l’élevage.

Zacapa el alma

Cette fois-ci, avec la recherche de notes noix de coco , de vanille qu’apportent les fûts brûlés. En brûlant les extrémités des barriques, des petites fissures se créent et développent ces notes de caramel, et d’amandes grillées que je recherche. 
Nous avons la chance de posséder des sols argileux et de la canne à sucre plantée sur des terroirs volcaniques.

Les terres sont difficiles à travailler, mais elles nous permettent d’obtenir une concentration des sucres plus importante. Lors de fortes pluies, les sols absorbent davantage l’humidité. Quand il fait chaud et que le sol se craquelle sous le poids de la sécheresse, la concentration en sucre augmente.

Nous travaillons uniquement avec du jus de canne concentré. La température de fermentation se situe entre 28 et 32° degrés, qui est idéale pour le type de levures que nous utilisons (levure extraite de l’ananas). Pour les éditions suivantes, je souhaite garder le secret, mais je peux dire que je continuerai à explorer les complexités et l’impact de l’élevage sur les rhums.

LD : Dans une autre vie, qu’auriez-vous pu exercer comme métier ?

LV : Sans hésiter, nez dans l’industrie du parfum. Je viens de terminer une collaboration avec un célèbre nez espagnol, les similitudes avec le monde du rhum sont nombreuses.

J’aime plus que tout dessiner et imaginer les rhums que je considère comme mes enfants. J’aurais pris un plaisir fou à élaborer de belles fragrances avec les différentes essences qui peuvent composer un parfum.

LD : Avez-vous déjà une idée sur la personne qui prendra votre suite ?

LV : J’y travaille depuis longtemps. Dans le futur, Je souhaite que Maria, une jeune femme talentueuse que je forme depuis quinze ans prenne ma place, mais patience je suis encore là pour quelques années (rires) ! 

Rhum Zacapa « El alma » 80 € disponible à la Grande Epicerie et à la Maison du Whisky