[Focus Terroir] Andrew Hassell, Directeur Général de Stade’s West Indies Rum Distillery

Andrew Hassell nous explique comment il mène un véritable travail d’historien pour comprendre comment le rhum de la Barbade était fait dans le passé, et comment il peut évoluer à l’avenir.

Y a-t-il une identité propre aux rhums de la Barbade ?

Les rhums de la Barbade possèdent une infinie palette de complexité, reflétant parfaitement l’héritage et le savoir-faire de distillation de l’île à l’origine du rhum. Nous aimons dire que les rhums barbadiens sont bien équilibrés, créés par des personnes bien équilibrées ! Grâce à notre « Distiller’s Vault » (salle des archives) à la WIRD, nous savons qu’historique- ment, les Barbadiens utilisaient des alambics pot still, alambics à colonnes, et « chamber stills », pour produire un assemblage de rhum complexe, avec des notes de vanille et de noix de coco.

À la WIRD, nous produisons une large gamme de rhums, certains dépassant même les 2600 gr/hl. Nous disposons d’alambics «pot still», de colonnes et nous sommes également la seule distillerie des Caraïbes à utiliser un alambic à triple chambre, le Vulcan, nous permettant de produire des rhums très intenses.

Quel est le terroir de la Barbade ?

Le climat de la Barbade est tropical et généralement chaud et humide toute l’année, ce qui favorise la croissance de la canne à sucre, avec des températures allant de 11 à 34 degrés Celsius. La Barbade connaît deux saisons principales : la saison sèche, de janvier à juin, et la saison humide, de juillet à décembre.

Pendant la saison humide, les précipitations sont évidemment plus fréquentes, avec une moyenne de 1800 mm par an, ce qui permet à la canne à sucre de rester hydratée et en bonne santé. Les variations entre les zones côtières et les hauts plateaux de l’intérieur sont assez mineures et s’observent surtout la nuit, où il fait légèrement plus frais dans le centre et l’est de l’île.

À la Barbade, la composition du sous-sol est unique et se constitue principalement de calcaire corallien (bien drainant, excellente filtration et rétention de l’eau) et riche en minéraux tels que le calcium, le magnésium et le fer. Ces nutriments sont absorbés par les plants de canne à sucre et transférés dans le rhum au cours de la distillation.

Alambics pot still chez WIRD
Alambics pot still chez WIRD

Parlez-nous du distillers’ vault : qu’est-ce que c’est et comment l’utilisez-vous ?

Le « Distileur’s Vault » est une pièce un peu mystérieuse où sont stockés divers documents et archives de la WIRD depuis 1893. En 2018, l’équipe a commencé à trier et identifier les documents présents, et nous y avons redécouvert des écrits vieux de plus de 100 ans !

Ils témoignent du passé de la distillerie, contenant des informations sur le personnel, la conception des alambics et la manière dont les rhums étaient produits, vieillis et assemblés. Chaque document de la chambre forte est comme une pièce de puzzle nous permettant de comprendre ce qu’est, historiquement, le rhum de la Barbade.

Le tout constituant un véritable témoignage du savoir-faire et de l’héritage de la Barbade, le berceau du rhum. Pour vous donner un exemple : George Stade, un distillateur et aventurier, fondateur de WIRD, a créé le premier alambic à colonne de la Barbade, en 1894, et nous avons trouvé des douzaines de brevets à son nom. Sa mission était de distiller les meilleurs rhums du monde, à la Barbade !

À partir de toutes les archives et de tous les plans, qu’avez- vous découvert sur la production de rhum à la Barbade et sur son terroir unique ?

Dans nos archives, nous avons trouvé beaucoup d’éléments très intéressants, notamment des références historiques au double vieillissement quand les rhums étaient envoyés vers l’Europe et connaissait un second vieillissement en climat continental (c’est d’ailleurs de cette tradition ancienne dont Planteray s’inspire pour son double vieillissement).

L’utilisation de différents types de bois pour fabriquer des fûts et non pas seulement en fût de chêne, et le vieillissement du rhum dans de grandes cuves en bois (large vat) ou la technique de browning. Les archives montrent également qu’il existe des références historiques à la fermentation du rhum à l’aide d’un peu d’eau de mer.

C’est une tradition que nous apprécions, que nous continuons à appliquer et que nous voulons perpétuer. (Le sel ne traverse pas le processus de distillation. Il crée plutôt un environnement spécifique pour la fermentation). Le Distiller’s Vault est un témoin de l’ex- pertise précise de la Barbade dans la distillation.

Qu’est-ce qui a le plus évolué depuis le XVIIe siècle dans la manière de faire le rhum ?

L’essentiel est la distillation à feu direct….

Quelles sont leurs caractéristiques ?

Une teneur spécifique en minéraux, des bactéries et des levures naturelles sont les principales caractéristiques de la mélasse que nous contrôlons. Ces caractéristiques contribuent à créer l’environnement qui détermine le profil aromatique obtenu.

Quels types de rhums sont produits à partir de ces mélasses ?

Nos rhums à fermentation lourde (heavy) distillés dans les alambics à repasse, ainsi que les rhums de force moyenne (medium) distillés des alambics à colonne sont typiquement ceux pour lesquels nous utilisons les meilleures mélasses.

Une mélasse de moins bonne qualité peut entraîner des défauts dans le rhum, que nous devons éliminer avec beaucoup d’efforts. Dans certains cas, vous aurez besoin des capacités de séparation de l’alambic à colonne pour traiter certaines mélasses de moindre qualité.

Si les alambics à colonne ne sont pas disponibles, d’autres méthodes peuvent être utilisées pour maintenir le profil requis : faire les coupes à l’étape correcte et assembler après la distillation.

Selon vous, les alambics font-ils partie du terroir de la Barbade ?

Oui, les alambics font partie de l’histoire et du savoir-faire de la Barbade, à l’origine même du rhum, ils font donc partie du terroir.

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