Depuis dix ans, La Maison du Rhum s’impose comme une référence pour les amateurs de rhums. À la tête de cette cave parisienne devenue lieu de vie et de découverte, Eddy La Viny partage avec passion son regard sur le marché, ses coups de cœur et sa vision d’un métier en pleine mutation. Rencontre avec un artisan du goût, défenseur d’un rhum authentique et porteur de valeurs humaines fortes.

Pouvez-vous vous présenter et nous dire depuis combien de temps votre cave existe ? Combien de références avez-vous en magasin ?
Je suis Eddy La Viny, cofondateur de La Maison du Rhum avec Gloria Aimé. Nous avons ouvert notre cave en 2014, il y a dix ans déjà, avec l’envie de créer un lieu entièrement dédié au rhum : un espace où l’on puisse acheter de belles bouteilles, mais aussi découvrir et partager des expériences autour de ce spiritueux. Installée dans Paris 17ᵉ, La Maison du Rhum réunit aujourd’hui plus de 500 réf. venues des quatre coins du monde. C’est une boutique conviviale, doublée d’un site en ligne, et un lieu de vie où nous organisons chaque année des centaines d’ateliers de dégustation pour transmettre notre passion.

Quelles sont les références les plus vendues ?
Pour les rhums blancs, nos références phares restent : Bologne Black Cane, Neisson Zépol Karé, A1710 Renaissance. Côté rhums vieux, les amateurs plébiscitent : A.H. Riise, Eminente, JM XO, et Bielle XO.
Nos meilleures ventes reflètent bien l’équilibre que nous cherchons à maintenir entre grands classiques et découvertes artisanales. Les amateurs se tournent volontiers vers des références incontournables comme A.H. Riise, Eminente 10 ans, Bologne black cane,
Clément Homère XO, JM XO ou encore Diplomatico Reserva Exclusiva, apprécié pour sa rondeur. Ce sont des repères rassurants, qui séduisent autant les passionnés de longue date que les curieux qui découvrent le rhum.
Mais l’engouement se porte de plus en plus sur nos propres créations. Je pense notamment à notre crème de Rhum à la Pistache, signée Académie du Rhum et élaborée artisanalement en interne, ou encore aux punchs “On ti Dousè”, créé par Steeve Firmin à partir de recettes artisanales, déjà médaillées en concours. Nous proposons aussi de beaux rhums arrangés, comme le Maracudja de Longueteau, qui rencontrent beaucoup de succès.
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Ces produits maison trouvent particulièrement leur place lors de nos ateliers de dégustation, où l’échange pousse souvent les participants à sortir des sentiers battus pour découvrir de véritables pépites. On remarque d’ailleurs une tendance de fond vers des rhums plus authentiques, moins sucrés, qui expriment davantage leur terroir, comme ceux de Neisson, Bielle, Flor de Caña, ou encore certaines sélections en Single Cask.

Comment voyez-vous l’évolution du marché ?
Le marché des spiritueux traverse aujourd’hui une zone de tension. Entre perte de pouvoir d’achat, incertitudes politiques, climat international anxiogène et inflation persistante, les consommateurs arbitrent davantage leurs dépenses. Cela se traduit par une baisse de la consommation en volume, particulièrement marquée sur les segments d’entrée de gamme.
En revanche, on observe que les amateurs continuent de se tourner vers des produits premium, des cuvées identitaires, ou encore des expériences immersives qui justifient leur prix par une vraie valeur ajoutée. C’est une tendance globale sur le marché : moins d’achats impulsifs, mais des choix plus réfléchis et plus qualitatifs.
Dans ce contexte, il ne suffit plus de se contenter de vendre des bouteilles. Il faut développer ce que j’appelle une activité “augmentée” : proposer des ateliers, des expériences, des découvertes, afin de maintenir le lien avec le public et d’offrir un supplément d’âme. C’est ce qui permet, malgré le climat actuel, de stabiliser notre chiffre d’affaires et de continuer à transmettre la passion du rhum.

La grande distribution propose de plus en plus de références, qu’est-ce que cela vous inspire ?
La grande distribution élargit son offre en rhums et spiritueux, et cela change beaucoup la donne pour les cavistes indépendants. Nous sommes pris en étau : d’un côté, la GMS qui multiplie les références et tire les prix vers le bas, de l’autre, les plateformes en ligne qui pratiquent des politiques tarifaires agressives. Ce double mouvement exerce une pression forte et fragilise notre modèle.
À cela s’ajoutent des réalités locales très concrètes : à Paris, la politique du stationnement complique la vie de nos clients et rend l’accès à nos boutiques moins fluide. Dans un contexte où le marché global des spiritueux connaît déjà une baisse en volume, notamment sur les segments standards, ces freins supplémentaires rendent le quotidien plus difficile.
Mais les cavistes indépendants ont une carte maîtresse : l’accompagnement, le conseil, et surtout l’expérience. Contrairement à la GMS, nous pouvons expliquer l’histoire d’un produit, faire déguster, orienter vers une pépite artisanale, ou encore proposer un atelier. Ce sont ces éléments différenciants qui permettent de résister et de continuer à créer de la valeur, même quand la conjoncture est compliquée.
Quels rhums ont vos faveurs ?
Je bois avec modération, mais toujours avec délectation. J’aime naviguer entre agricoles et rhums de mélasse, selon l’humeur et le moment. Les agricoles pour leur fraîcheur et leur expression du terroir, les mélasses pour leur rondeur et leur gourmandise. Mais si je devais choisir, je reviens souvent vers les XO : il y a quelque chose de fascinant dans leur complexité, leur richesse aromatique et cette finale qui s’étire, comme une conversation qu’on n’a pas envie d’interrompre.

Quelles sont vos plus belles rencontres avec des producteurs ?
Sans hésiter, mes plus belles rencontres ont été celles de 2023 au Venezuela avec Santa Teresa et de 2024 au Nicaragua avec Flor de Caña.
À la Hacienda Santa Teresa, j’ai rencontré Alberto Vollmer, cinquième génération à la tête de la distillerie. Son engagement m’a profondément marqué : avec le Project Alcatraz, il a réussi à réinsérer d’anciens membres de gangs grâce au travail, à l’accompagnement et même au rugby. Une initiative humaine et sociale unique, qui montre que le rhum peut aussi porter des valeurs fortes.
L’année suivante, au Nicaragua, j’ai découvert Flor de Caña et échangé avec leur Global Brand Ambassador, Mauricio Solórzano. J’y ai trouvé une autre forme d’engagement, axée sur la durabilité : production single estate, certification carbone neutre, respect de l’environnement. Deux expériences inoubliables, qui prouvent qu’au-delà des bouteilles, le rhum est aussi une histoire d’hommes et de convictions.
Votre plus beau voyage sur les terres du rhum ou votre destination de rêve ?
Je dirais les Antilles françaises. La Martinique, la Guadeloupe, Marie-Galante… chaque île est un véritable patchwork de distilleries à visiter. J’aime, à chacun de mes voyages, me replonger dans ces paysages, dans ces parfums de canne à sucre, et retrouver cette atmosphère unique qui a façonné mon amour du rhum.
Enfin, avez-vous des anecdotes marrantes avec des clients à nous raconter ?
Il y aurait mille anecdotes à raconter ! Mais ce qui revient toujours, c’est la convivialité qui naît naturellement pendant nos ateliers de dégustation. Très vite, les barrières tombent : on rit, on échange, et il n’est pas rare que des participants qui ne se connaissaient pas en début d’atelier repartent en amis.
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