Bira ! La marque de spiritueux canadiens éveille les sens

Karl Mudzamba, un expatrié zimbabwéen ayant vécu en Nouvelle-Zélande, nous conte d’odyssée de sa marque Bira !, et comment il fait pour mener sa barque dans les eaux compliquées du commerce des alcools canadien. Ses cuvées réchauffent en tout cas les coeurs au pays du grand froid !

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Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre carrière ?

Je m’appelle Karl Mudzamba. Je suis un expatrié zimbabwéen résidant à Vancouver, sur la côte ouest du Canada. Je travaille sur le front de mer, en tant que professionnel des terminaux à conteneurs depuis vingt ans.

À un moment de ma vie, j’ai joué au rugby, ce qui m’a amené en Nouvelle-Zélande où j’ai vécu pendant 12 ans. Je travaille également dans le secteur du rhum, depuis quatre ans. C’est mon travail d’amour que j’entretiens pendant mon temps libre.

Comment êtes-vous devenu un embouteilleur indépendant ? Et depuis quand ?

J’aime le rhum avant tout. Le Canada n’est pas le meilleur endroit pour quelqu’un comme moi parce que nous n’avons pas les meilleures sélections. Au fil des ans, je me suis adonné à ma passion et j’ai voulu contribuer aux conversations sur le rhum dans ma région.

J’ai d’abord cherché à importer des marques, mais il s’avère que l’enthousiasme ne suffit pas à un débutant. Je comprends le sens commercial de cette démarche, d’autant plus que je suis dans le métier depuis presque quatre ans. La voie indépendante était ma seule option et je suis reconnaissant de la façon dont les cartes sont tombées. J’ai beaucoup plus d’autonomie et j’ai appris le métier à mon rythme.

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Comment faites-vous vos sélections ?

Je m’assois avec la patronne, ma femme, nous dégustons des échantillons et décidons de ce qu’il faut mettre en bouteille. C’est elle qui fait les chèques.

Comment procédez-vous pour importer de l’alcool (et du rhum) au Canada ?

Les règles relatives à l’alcool sont assez complexes au Canada. Chaque province possède une commission des alcools qui agit indépendamment des autres. Il m’a fallu environ un an de recherches pour être suffisamment sûr de pouvoir lancer le projet.

Mon embouteilleur, Rock Spirits, se trouve sur la côte est. Lorsque j’achète du rhum en vrac, je le lui envoie et il s’occupe du reste. Ils m’ont été particulièrement précieux, car ils savent comment s’y prendre pour respecter la réglementation. Je m’appuie également sur leur échelle, ce qui m’aide à maintenir les coûts à un niveau raisonnable.

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Comment parvenez-vous à commercialiser vos rhums avec le monopole d’État ? Comment cela fonctionne-t-il ?

Nous sommes actuellement présents dans deux provinces, l’Alberta et la Colombie-Britannique. En Alberta, la commission des alcools est chargée de la réglementation. C’est la première province à avoir entièrement privatisé le commerce de détail.

Le gouvernement s’est retiré du secteur de la vente au détail en 2002. L’Alberta a des taxes sur les alcools parmi les plus basses de l’hémisphère occidental. L’Alberta offre le meilleur choix d’alcool, et de loin, au Canada. Quelques détaillants y expédient leurs produits dans tout le pays, de sorte que notre rhum est distribué à tous ceux qui en veulent au Canada, quel que soit leur lieu de résidence.

C’est en Alberta que notre rhum est le plus abordable. La Colombie-Britannique a un système mixte, le gouvernement étant toujours impliqué dans la vente au détail, aux côtés de magasins de détail privés. Nos sélections sont les deuxièmes en Alberta en raison des magasins privés, lorsque l’on compare à l’échelle nationale. En Colombie-Britannique, notre rhum est vendu dans des magasins privés. La plupart des provinces canadiennes ont un monopole d’État.

Comme vous le savez probablement, c’est un champ de mines de paperasserie pour y entrer, puis vous devez faire face à des taxes élevées sur les alcools et à d’autres exigences rigoureuses. Comme nous ne disposons que d’un nombre limité de bouteilles, il est logique que nous nous concentrions sur la région où nous nous trouvons actuellement.

Si l’occasion se présente d’entrer dans une autre province, nous l’examinerons. Par le passé, j’ai organisé des classes de maître dans des provinces où nous ne sommes pas officiellement présents. Je continuerai à le faire. Nous vendons beaucoup de bouteilles au Québec et en Ontario, et ces cours nous aident à fidéliser nos clients.

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Un mot sur le nom de votre marque : Bira ! ?

C’est un lien avec mes racines. Je suis Shona et mon peuple croit depuis des années que les esprits de nos ancêtres sont le lien entre les vivants et Dieu. Nous avons une cérémonie appelée Bira, au cours de laquelle les familles se réunissent pour attirer les esprits de nos ancêtres dans la maison.

C’est une cérémonie qui dure toute la nuit et ces esprits possèdent le corps des médiums spirituels de la famille. Les prières sont alors communiquées à Dieu de cette manière. C’est une fête, il y a de la musique, de la danse, de la nourriture et de l’alcool.

Les gens deviennent spirituels, surtout lorsqu’ils boivent avec leurs proches, quelle que soit leur race. Cela m’a semblé être un bon moyen de lier mes racines à la dégustation du rhum que nous mettons en bouteille.

Où peut-on trouver vos sélections ? Et combien de références avez-vous commercialisées depuis le début de l’aventure ?

Pour l’instant, il vous faudra prendre l’avion pour l’ouest du Canada, ou trouver une mule de bonne volonté pour vous en apporter en Europe. Nous travaillons sur l’exportation prochainement.

Jusqu’à présent, nous avons 3 expressions, la première étant le South Pacific 12yr, un rhum pot still fidjien vieilli sous les tropiques. Nous avons ensuite mis en bouteille deux rhums au jus de canne provenant de la distillerie Mhoba en Afrique du Sud.

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Où peut-on trouver vos rhums à Vancouver ?

À Vancouver, vous pouvez trouver nos bouteilles au Legacy Liquore Store dans le village olympique, au Gull sur le North Shore et au Jak’s Liquor.

Quelle est votre vision de l’embouteillage indépendant et que pensez-vous de la prolifération des acteurs ?

Il y a beaucoup de pays en dehors des Caraïbes qui cultivent la canne à sucre et produisent également du rhum. Je veux m’approvisionner davantage en rhum provenant de ces régions, c’est ma vision.

Il est plus difficile à obtenir, mais je pense que cela vaut la peine d’apporter quelque chose d’un peu différent sur le marché. Je parlerai tout d’abord de la situation en Amérique du Nord. Il y a beaucoup plus d’acteurs aux États-Unis qu’au Canada.

Mon projet était le seul de ce type jusqu’à cette année au Canada. Les consommateurs qui s’y connaissent en rhum sont moins nombreux qu’aux États-Unis, du moins dans le segment où nous sommes en concurrence.

Les Américains sont plus nombreux, ce qui est logique. J’ai vite compris que je devais faire plus d’éducation des consommateurs (classes de maître) que n’importe quelle autre forme de promotion.

Plus il y aura de « bruit de rhum » de l’autre côté de la frontière, mieux ce sera pour mon projet à l’avenir. C’est une bonne chose qu’il y ait plus d’indépendants, ce continent a toujours regardé de l’autre côté de l’Atlantique en enviant les choix que vous avez là-bas.

Quelles sont les sélections/rhums qui vous ont le plus impressionné ?

Quel est votre enfant préféré ? Ils sont tous différents, donc j’en prendrai un en fonction de mon humeur.

Quel type de rhum préférez-vous et pour quelle raison ?

Je préfère les rhums corsés, je suis à fond dans la saveur.

Quels sont vos futurs projets ?

Nous allons mettre en bouteille trois rhums dans quelques semaines, un rhum vénézuélien de 15 ans d’âge vieilli sous les tropiques, et deux rhums au jus de canne vieillis en Europe. Ces rhums proviennent de Marie-Galante, en Guadeloupe. Ils ont tous deux passé 6 ans dans des fûts de Cognac, puis l’un d’entre eux a passé une année supplémentaire dans des fûts de seigle et de bourbon.

www.birarum.com