Fêtons la Saint Patrick avec du rhum, ou du whiskey vieilli en fût de rhum !

Saint Patrick ne buvait pas de rhum, probablement pas de whisky (mais peut-être de la bière), mais sa fête est tout de même l’occasion pour Rumporter de se pencher sur l’Irlande, les finishs en fûts de whisky, et ceux en fûts de bière.

Saint Patrick

À première vue, la relation entre l’Irlande et le rhum ne va pas de soi. L’île émeraude étant plutôt connue et célébrée pour son whiskey. C’est très probablement en Irlande que le whisky a été ‘inventé’ au XIIIe siècle. Il s’agissait au départ d’une distillation simple de bière, appelée uisge beatha en gaélique. Au fil du temps, les techniques de distillation se sont améliorées, et le whisky irlandais est monté en gamme.

En fait, jusqu’au milieu du 19e siècle, il était considéré comme bien plus qualitatif que son homologue écossais, et aussi se vendait mieux. Alors que le whisky écossais adopta avec enthousiasme la colonne à distiller (sauf dans les Highlands pour les single malts) à partir des années 1850, les Irlandais campèrent sur leurs positions.

Non seulement ils continuèrent à distiller en alambics à repasse pot stills, mais aussi à distiller 3 fois, au lieu de 2 fois pour le Scotch whisky. Enfin, il adoptèrent définitivement le “e” dans leur façon d’évoquer leur spiritueux et on parla désormais du whiskey irlandais et non du whisky.

Après une longue traversée du désert au 20e siècle, le whiskey connaît actuellement une belle reprise. Mais revenons au rhum, car l’embellie qui touche le whiskey en Irlande a aussi un impact sur notre spiritueux préféré.

L’Irlande, terre de rhum

D’abord parce que de nombreuses distilleries s’aventurent désormais à faire vieillir ou plutôt, à finir, leurs whiskeys dans d’ex-fûts de rhum. Ainsi la distillerie dublinoise Teeling et son Premium Blend Irish Whiskey vieillit en fût de rhum du Nicaragua. Bushmills, la plus vieille distillerie au monde encore en activité, a fait de même avec son Carribean Rum Cask Finish.

On peut aussi citer West Cork (nord ouest de l’île) et son single malt Rum Cask Finish qui a passé plusieurs mois en ex-fûts de rhum du Panama, Tullamore Dew XO Caribbean Rum Cask Finish, Glendalough Single Cask Madeira Cask Finish, et bien d’autres encore !

Mais ce n’est pas tout puisqu’on produit aussi du rhum en Irlande. Ainsi, Blacks a été la première distillerie à y distiller du rhum à partir de mélasse importée en 2018. Elle fut bientôt suivie par Fore Valley, Killowen ou encore Baoilleach. Dans le même genre Coppeland Rum est original puisqu’il s’agit d’un assemblage de rhum distillé à la Barbade et de rhum distillé en Irlande.

On peut aussi faire mention du rhum Two Shores, qui a vieilli 8 ans en amérique centrale, avant de reposer 6 mois sur les côtes irlandaises. Toujours sur le thème d’un mariage entre Irlande et rhum, comment ne pas mentionner le Admiral Rodney Officer’s Release No.2 (Saint Lucia Distillers, Sainte Lucie), un rhum de 2009 qui a séjourné quelques mois en ex-fûts de whiskey irlandais. Enfin une dernière curiosité pour la route : un rhum blanc des Caraïbes qui a été infusé avec des pommes jonagold irlandaises, Symphonia Irish Apple Rum.

3 questions à Guillaume Ferroni

Nous avons demandé à Guillaume Ferroni, qui a tenté le finish en ex-fûts de whisky, et ex-fûts de bière, comment il avait procédé.

Comment réussir un finish en fût de whisky ?

Il faut considérer nos deux cuvées séparément. Notre rhum Brut de fût Jamaïque a été fini dans des fûts de premier remplissage qui avaient auparavant accueilli notre whisky Roof of Rye (produit à partir de seigle). On fait un finish de 3 mois seulement pour ne pas rajouter des notes de bois à un rhum Worthy Park qui a déjà vieilli, mais seulement des notes de rye. On veut que le rhum garde son caractère.

Et pour Boucan d’enfer ?

Boucan d’enfer est assez différent puisqu’il s’agit d’un assemblage de 5 rhums en provenance de Trinidad (mélasse), Guyana (mélasse), Ile Maurice (type agricole), Martinique (agricole) et Martinique grand arôme (mélasse) qui a connut un finish dans des fûts de whisky tourbé d’Islay.

On a eu du mal à trouver le bon dosage, car quand nous avons goûté la première fois, le rhum n’était pas assez marqué et quand nous avons renouvelé l’opération peu de temps après, il y était trop tourbé. On ne sentait plus le rhum du tout. On a donc refait un assemblage avec des rhums plus lourds et aromatiques et on a remis le tout en vieillissement.

Les fûts tourbés évoluent différemment des ex-fûts de Rasteau, ou de porto par exemple. Je pense que la tourbe est présente très profondément dans le bois, ce qui donne une extraction linéaire et qui dure dans le temps.

Et quid des finishs en fûts de bière ?

Tout est parti de ces fûts d’Islay, qui étaient toujours tourbés, mais pas assez pour faire notre Boucan d’Enfer. On a été sollicités par des brasseurs qui avaient besoin de fûts et on les a donnés à quatre brasseries marseillaises. Ils nous les ont rendus et on a fait vieillir notre rhum de l’île Maurice 2015 dedans. Ça a donné notre gamme Brasseurs d’enfer. Cela donne des rhums encore un peu tourbés et une certaine amertume.

Pour en savoir plus sur la gamme Brasseurs d’enfer : “La Maison Ferroni s’affine en fûts de bières”


Saint-Patrick et le whisky

Saint Patrick, ou Patrick d’Irlande est un personnage historique, qui aurait vécu au Ve siècle de notre ère, aurait introduit ou en tout cas développé le christianisme et même qui selon la légende, aurait inventé le whisky !

Le conditionnel est de rigueur car on a très peu de témoignages de première main relatant sa vie. Il aurait été capturé à l’âge de 16 ans par des pirates et emmené en Irlande où il aurait été réduit en esclavage. Il y rencontré Dieu, serait ensuite rentré en Grande-Bretagne quelques années plus tard et serait devenu moine.

En 432, il aurait été un des principaux évangélisateurs de l’Irlande. Et le whisky dans tout ça ? Son invention par Saint-Patrick a toutes les apparences d’une légende. En effet, le saint-homme est mort en 461, et le whisky serait apparu en Irlande (ou en Ecosse, ou les deux) au 13e ou 14e siècle.

Toujours est-il qu’il est devenu le Saint-Patron de l’Irlande (du sud), et que la date présumée de sa mort (le 17 mars) est devenue une fête annuelle particulièrement importante pour les Irlandais catholiques… et plus généralement pour tous les buveurs et fêtards du monde entier. La Saint Patrick est en effet devenue dans l’imaginaire collectif, la fête de la bière… et du whiskey (Irlandais de préférence).

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