Lancée il y a à peine trois ans, cette marque d’arrangés normands au nom maya, a déjà conquis sa région natale. Désormais, Gauthier Paris et sa famille se tournent vers le reste de la France Métropolitaine avec des ambitions affichées. Rencontre avec un serial entrepreneur, et ses subtiles recettes.
Comment avez-vous eu l’idée de vous lancer dans les arrangés ?
Avant la Covid 19 nous travaillions en famille dans l’événementiel. J’étais propriétaire d’un domaine de mariages dans le Calvados et Romain mon fils et Pauline ma belle-fille louaient des Combis Volkswagen des années 70 équipés d’une cabine photo pour animer les vins d’honneur et les cocktails sur d’autres lieux de mariage.
Nous faisions un véritable carton. La pandémie est arrivée et patatras ! Tout s’est arrêté pendant plus d’une année. Nous nous sommes dit que s’il y avait un jour une nouvelle pandémie, nous serions en difficulté. Nous avons donc réfléchi en famille pour trouver une autre activité.
Et pourquoi le rhum ?
Il se trouve que Romain et Pauline expérimentaient déjà des recettes d’arrangés pour leur consommation personnelle et leurs amis. Mon fils Romain en décembre 2021 m’a dit : « Pourquoi ne pas créer une société de rhum arrangé en Normandie ? », pensant que j’allais lui rire au nez. Mais j’ai tout de suite adhéré à cette idée folle et pleine de challenge.
Ça n’a pas dû être évident de se lancer !?
Nous n’y connaissions rien ! Nous ne savions même pas comment acheter ni vendre de l’alcool en France, ni quel rhum utiliser, quelle bouteille, quelle étiquette, quelle marque, quel circuit de distribution… Il y avait tout à apprendre et à inventer !
Nous avons alors procédé étape par étape. Nous nous sommes renseignés auprès des douanes et des fraudes pour savoir comment importer de l’alcool en gros, le transformer et le revendre.
En parallèle, nous avons contacté toutes les distilleries des Antilles françaises pour leur demander des échantillons. La seule qui nous a répondu favorablement a été l’Habitation Bellevue à Marie-Galante en Guadeloupe. Mais elle ne pouvait pas traiter directement avec nous, car il fallait passer par sa maison mère à Bordeaux. Cette dernière a vite été au courant et est venue nous voir en Normandie avec des échantillons de rhums de ses différentes marques. Et à la dégustation… Nous avons choisi Bellevue !
Donc le rhum est venu en premier ?
Oui, car pour faire un bon rhum arrangé, il faut avant tout une très bonne base de rhum blanc, et nous l’avons trouvée avec le rhum agricole Bellevue. Nous avons fait ensuite une veille concurrentielle pour décider de ce que nous allions faire.
Et l’identité de marque ?
Nous nous sommes penchés toute de suite sur le packaging avec le choix d’une forme de bouteille qui change de celle utilisée par un grand nombre d’acteurs dans le monde des arrangés. Nous ne voulions pas d’une étiquette blanche transparente et nous ne voulions pas non plus d’un nom de marque évocateur des Antilles.
Initialement nous étions partis dans l’univers normand, les Vikings, les drakkars… mais là encore nous avons choisi de ne rien faire comme tout le monde et sommes partis dans celui de la civilisation maya.
Pourquoi les Mayas ?
Parce que mon fils et ma belle fille rythment leur vie sur le calendrier maya ! Nous avons jeté notre dévolu sur Kabrakan (changé en Cabrakán), le dieu des tremblements de terre et des montagnes. Il y avait en plus un jeu de mots avec “canne”. Le logo a été créé entièrement en interne rappelant la civilisation maya en son centre et les Antilles françaises avec ses végétaux exotiques en arrière-plan.
Et les recettes, comment sont-elles nées ?
Romain et Pauline en ont créé une centaine avant d’en retenir au final une trentaine. On ne peut pas tout arranger ! Et nous avons choisi des créations totalement différentes du marché : en juillet 2021, nous commencions à commercialiser une création « Fraise-Basilic-Citron Vert qui a tout de suite connu un franc succès avec cinq autres également.
Pourquoi avoir fait le choix du fruit dans la bouteille ?
Nous n’avons pas voulu faire du rhum arrangé filtré parce que nous pensons que les clients doivent voir ce qu’ils vont déguster. C’est en plus beau et coloré dans la bouteille et donc très vendeur.
Chez Cabrakán, tout est fait à la main, 100 % naturel, avec des fruits frais, sans colorants et sans conservateurs. Notre rhum arrangé Cabrakán est réputé pour sa subtilité, son équilibre et son taux de sucre très modéré, ce qui lui confère un vif succès.
Quel est votre circuit de distribution ?
C’est très simple, nous travaillons essentiellement avec des cavistes indépendants et des épiceries fines. Nous n’avons pas prévu d’aller en grande distribution.
Nous travaillons vraiment en famille, 5 membres d’une même famille (mon épouse Anne est aux papiers et ma fille Anouchka nous a rejoints également) et chacun à son rôle.
En trois ans, nous avons conquis la quasi-totalité de la Normandie, des caves en tout cas et sommes très présents également dans les Hauts-de-France.
Quelles sont vos ambitions ?
Nous avons commencé dans un local de 60 m2 chez mon fils et ma belle-fille et nous venons de déménager dans un local de 350 m2 dans la banlieue de Caen. La chaîne de production est en partie automatisée, mais la découpe et la mise en bouteille des fruits sont et resteront toujours un travail manuel.
Aujourd’hui nous avons une gamme de 12 créations permanentes et sortons deux fois par an des éditions limitées : printemps-été et automne-hiver. Le rhum arrangé, c’est un marché ultra-saturé. La concurrence nous stimule. Nous sommes Normands, donc des conquérants, nous avons l’ambition d’être présents sur l’ensemble du territoire dans les années à venir.