A noter d’une croix rouge dans vos agendas, si vous ne l’avez pas encore fait : du 13 au 15 avril, Rhum Fest Paris investit la Grande Halle du Parc Floral de Vincennes. Cette sixième édition voit encore plus grand : plus de m2, plus de marques, plus de rhums, plus d’animations et un bon paquet de nouveautés. Rencontre avec Cyrille Hugon, co-fondateur du salon pour découvrir un programme bien alléchant !
Laurence Marot : Pouvez-vous nous donner un état des lieux du rhum pour cette nouvelle année 2019 ?
Cyrille Hugon : Le rhum poursuit son embellie aussi bien dans les chiffres que dans les intentions. En Grande- Bretagne, le chiffre d’affaires du rhum a dépassé le Milliard de livres en 2018 et en France, il croit de plus de 10% par an alors que le volume des ventes d’alcool est globalement en baisse. C’est d’autant plus intéressant que c’est par le haut (logique me direz-vous) qu’il grandit. Et oui, les ventes de rhum blanc sont en baisse et ce sont les « nouvelles » expressions qui dynamisent les ventes : spiced, rhums arrangés et surtout les vieux… Voilà pour le bilan économique… Le bilan gustatif parle de lui-même : c’est une orgie de plaisir et de rêve que nous invite le rhum depuis maintenant 10 ans, ça les lecteurs de Rumporter le savent très bien.
LM : Un espace deux fois plus grand, près de 200 marques et 60 pays exposants, nouveau look pour les stands, Rhum Fest Paris se positionne comme le plus gros salon du rhum d’Europe ?
CH : Franchement, c’est notre ambition, ne nous cachons pas mais c’est surtout un fait qui ne dépend pas forcément que de notre volonté car nous ne sommes pas dans une logique de surenchère à tous crins. Nous avons longtemps résisté mais nous sommes bien obligés d’accompagner le rhum dans l’explosion de sa diversité.
Tous les ans, depuis 5 ans, nous avons réussi à repousser les murs du salon mais ça devenait intenable, tant pour le confort des exposants que pour celui des visiteurs. On s’agrandit et on agrandit l’offre plaisir avec d’avantage d’animations, une boutique plus grande, plus de points de restauration (pour éviter les queues), des zones de repos plus nombreuses, des ouvertures vers la gastronomie avec Gault et Millau …
LM : Est-ce que la multiplication des salons de spiritueux vous oblige à être plus offensif et créatif ?
CH : C’est sûr qu’il faut s’affirmer comme un évènement incontournable car nos exposants ont un embarras de choix épouvantable et des ressources financières et humaines qui ne sont pas infinies. On le ressent au niveau des ventes, les négociations sont tendues et on ne peut pas s’endormir.
On doit continuer à proposer des nouvelles pistes de communication pour les rhums (Interviews Rumporter TV, une deuxième salle de Master Class, un Escape Game, des ateliers participatifs, des espaces immersifs, etc.) et des nouvelles envies pour les visiteurs (Jardin Chill Out, plus de restaurants, plus d’animations pédagogiques …). Ceci dit, la base, ça reste la dégustation et le voyage et, à ce niveau, on est servi avec une ribambelle de nouveautés et surtout de nouvelles origines.
LM : Parmi les exposants, on remarque de nouvelles provenances, l’Afrique, Madère, l’Asie, le rhum est devenu le spiritueux international ? Est-ce que la culture de la canne à sucre explose parallèlement ?
CH : La culture de la canne à sucre a explosé depuis longtemps concomitamment à la consommation de sucre. La raison de cette émergence de provenances, c’est plutôt la volonté de certains pays de sortir leur production d’une consommation locale (Madère) et le phénomène craft distilleries (Afrique du Sud et Asie du Sud Est) qui permet la création de petites unités de productions proche des champs de canne.
L’Afrique du Sud et la Thaïlande, pour ne citer que ces deux pays, sont parmi les plus gros producteurs de sucre depuis des décennies et ce n’est que récemment qu’une poignée d’entrepreneurs (souvent français pour ce qui est de l’Asie du Sud Est) y ont vu l’opportunité de créer des rhums locaux. Il ne faudrait pas non plus négliger le fait que le marché du sucre est complètement libéralisé depuis quelques temps et le rhum est un excellent moyen de rentabiliser des filières fragilisées par la concurrence des géants à bas coûts que sont le Brésil, l’Inde … ou la betterave.
Cette dimension, industrielle, n’est pas le moteur des rhums cités plus haut puisque ceux-ci ne sont pas des produits dérivés de l’industrie sucrière, mais je suis sûr qu’elle joue beaucoup au niveau global. Dans ce contexte, le plus bel exemple d’intelligence passionnée et vitale est celui de l’île Maurice, île qui semble comprendre tout plus vite que tout le monde, qui après avoir complètement orienté son industrie du sucre vers les sucres spéciaux à fortes valeurs ajoutées, s’est lancé dans le même mouvement, avec enthousiasme, dans le rhum. C’était il y a (seulement) une quinzaine d’année, avec le succès que l’on sait.
LM : Avez-vous constaté des catégories plus émergentes sur le salon, spiced rhum, rhum arrangé, embouteilleurs indépendants… ?
CH : Les 3 mon général. Ces trois catégories ont littéralement explosé et c’est tant mieux parce que ceux sont trois catégories qui permettent de s’exprimer sans forcément avoir d’énormes moyens financiers. On essaie de les accompagner sans être trop déconnant au niveau des prix. Quand tu penses que Cédric des Rhums de Ced a participé au tout premier Rhum Fest avec un budget qui ne te permettrait pas de te loger à Paris plus de trois jours (petit déj non compris) et que tu vois où il en est aujourd’hui, tu as envie de dire « trois fois oui » à des gens comme Délices Métisses qui s’accrochent avec passion et délicatesse pour fabriquer un truc qui les fait rêver et qu’ils partagent avec de plus en plus de monde.
LM : Vous avez mis en place un nouveau pôle, le Market Place ciblant les différents acteurs du rhum, quels sont les objectifs de ce nouvel espace ?
CH : En partant du constat que toute la planète rhum se rend à Paris en avril, nous avons voulu donner aux professionnels des espaces de rencontre plus confortables que l’herbe parfois humide du Parc Floral. Pour aller plus loin, nous mettons en place un programme d’échange via une plateforme sur notre site internet qui permettra à tous les professionnels de la filière de se donner rendez-vous sur le salon. Que ce soit les producteurs de rhum, les tonneliers, les fabricants d’alambic, les distributeurs européens de spiritueux, les verriers, les designers (…) ils sont nombreux à se croiser sur le salon sans se connaitre et sans forcément avoir le temps de se poser. L’idée de la Market Place, c’est de permettre à tous ces gens de travailler en amont leur agenda et se rencontrer sur place dans un espace dédié avec des tables et des chaises (la base quoi !).
LM : Quels seront les têtes d’affiche des prochaines Master Class et quels seront les nouveaux thèmes et les problématiques abordés ?
CH : Nous n’avons jamais eu autant de demandes pour les conférences que cette année, ce qui nous oblige à ouvrir une deuxième salle de conférence. En tête d’affiche, Alexandre Gabriel et Guillaume Ferroni of course mais surtout des nouveaux venus qui veulent faire entendre leur voi(e)x : l’Afrique, le Cap vert, Madère, le Japon …. On travaille également sur un programme dédié aux professionnels (bartenders et cavistes) avec David Cordoba, Guillaume C Leblanc (ex Dirty Dick) et Christian de Montaguère.
LM : C’est la première année que vous développez la partie gastronomique du salon. Quels seront les styles de cuisines représentés ?
CH : La gastronomie a toujours été présente sous sa forme la plus simple (bien manger !) via les Food trucks puisque tous les ans nous (re)choisissons des camions avec des thématiques bien en rapport avec le festival (La Martinique avec Beau Caillou, leVenezuela avec Alji Dulce, La Thailande avec les Hot Dogs de Richard). L’année dernière, nous avions travaillé avec le génial David Loyola des « Deux Amis » à Paris et cette année, nous accueillons un nouveau camion d’inspiration Afro-Caraïbes : New Sool Food.
LM : Quels sont les stands à ne pas manquer ?
CH : La question à laquelle je ne répondrai pas ma chère Laurence parce que je ne veux pas avoir d’ennuis si j’oublie quelqu’un.
Informations et billetteries : www.rhumfestparis.com